L’actualité sociale de la semaine : arrêt maladie, visite de reprise, harcèlement

Publié le 02/02/2024 à 10:11 dans Comité social et économique (CSE).

Temps de lecture : 5 min

Cette semaine, nous revenons sur les modifications apportées aux arrêts de travail en 2024. Nous vous faisons également une sélection de décisions relatives au domaine de la santé-sécurité au travail rendues en janvier sur la visite de reprise, la preuve des temps de pause ou encore la discrimination liée à l’état de santé.

Nouveautés 2024 relatives aux arrêts maladie

Plusieurs nouveautés affectent les arrêts de travail en ce début d'année, notamment en cas de télémédecine. Depuis le 1er janvier 2024, en télémédecine le médecin ne peut plus prescrire/renouveler des arrêts de travail d’une durée supérieure à 3 jours, ni avoir pour effet de porter à plus de 3 jours la durée d’un arrêt de travail déjà en cours. Le versement des IJSS est suspendu au-delà de 3 jours sauf exceptions.

En revanche il n’y a pas de nouveauté concernant le contrôle des arrêts maladie, la réforme de la contrevisite patronale ayant été censurée (voir notre article « LFSS 2024 : le Conseil constitutionnel censure les dispositions sur la suspension du versement des IJSS suite à un contrôle médical »).

Autre nouveauté :

Le bénéfice d’un arrêt de travail sans délai de carence a été étendu récemment à deux nouveaux cas de figure :

  • en cas de fausse couche (depuis le 1er janvier 2024) ;
  • en cas d’interruption mĂ©dicale de grossesse (c’est prĂ©vu pour le 1er juillet 2024 au plus tard).

ArrĂŞts maladie et visite de reprise

Pour les arrêts maladie d’au moins 60 jours notamment, une visite de reprise est obligatoire. C’est à l’employeur, dès qu’il a connaissance de la date de la fin de l'arrêt de travail, d’organiser l'examen de reprise, qui doit intervenir dans un délai de 8 jours. L’absence de visite de reprise peut ouvrir droit à des dommages et intérêts pour le salarié. Cela peut aussi justifier une prise d’acte. Mais qu’en est-il de la reprise du salaire ?

Lorsque l’arrêt de travail prend fin mais que le salarié ne passe pas de visite de reprise et ne retourne pas au travail, logiquement le contrat de travail reste suspendu et il n’y a pas reprise du salaire.

Mais il en va différemment si le salarié s’est tenu à la disposition de l’employeur pour passer à la visite de reprise.

La Cour de cassation vient de confirmer qu’un salarié qui, à l'issue de son arrêt de travail, se tient à la disposition de l'employeur pour passer la visite médicale de reprise, a droit au paiement de sa rémunération (Cass. soc., 24 janvier 2024, n° 22-18.437).

Etat de santé et discrimination

Un licenciement doit être complétement étranger à l’état de santé du salarié sinon il y a discrimination.

En cas de litige, c’est d’abord au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Il reviendra ensuite à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Dans une affaire récente, une salariée licenciée pour faute grave fait valoir qu’elle avait adressé un courrier à son employeur expliquant par son état de santé son comportement ; la tumeur cérébrale dont elle souffrait l'empêchait de voir la réalité de ses faits et gestes. Elle demande la nullité de son licenciement s’estimant victime d’une discrimination liée à son état de santé.

Sa demande est rejetée par la cour d’appel qui estime qu’il n’y a pas d'éléments suffisants laissant à penser que les comportements à l'origine des sanctions prononcées aient pu avoir pour origine la pathologie dont souffrait la salariée.

Mais la Cour de cassation rétablit l’ordre des choses. La salariée a bien présenté des éléments laissant supposer une discrimination en raison de son état de santé, l’employeur reconnaissant avoir reçu la lettre de la salariée l’informant de sa pathologie qui pourrait altérer son comportement.

Dès lors c’était à lui de prouver que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination (Cass. soc., 17 janvier 2024, n° 22-13.144).

Harcèlement moral et obligation de prévention des risques professionnels

Même si un salarié n’est pas reconnu victime de harcèlement moral suite à des faits qu’il dénonce, il peut bénéficier d’une indemnisation au titre d’un manquement à l’obligation de sécurité. La Cour de cassation vient en effet de rappeler que l’obligation de prévention des risques professionnels est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral (voir notre article « Harcèlement moral et obligation de prévention des risques professionnels : bien faire la distinction ! »).

Respect des temps de repos et de pause

On parle très souvent de la preuve des heures supplémentaires qui est partagée. En effet, lorsqu’un salarié réclame le paiement d’heures supplémentaires qu’il prétend avoir effectuées, il doit fournir des premiers éléments à l’appui de sa demande. C’est ensuite à l’employeur d’y répondre avec ses propres éléments pour que le juge puisse prendre sa décision.

Il n’en va pas de même en cas de litige relatif au respect des temps de pause et de repos du salarié.

La Cour de cassation vient en effet de rappeler que c’est à l’employeur seul que la charge de la preuve incombe. Dans cette affaire, les juges du fond avaient rejeté la demande de dommages et intérêts d’une salariée car les attestations produites par celle-ci sont imprécises quant aux horaires d'embauche et de débauche et au temps consacré à la pause méridienne. A tort car la preuve a ainsi pesé sur la seule salariée alors qu’elle appartient à l’employeur (Cass. soc., 17 janvier 2024, n° 22-20.193).

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Anne-Lise Castell

Juriste en droit social