Licenciement disciplinaire : les juges peuvent-ils aggraver la qualification de la faute ?
Dans le cadre d’un licenciement pour faute, les juges peuvent requalifier la gravitĂ© des faits reprochĂ©s. Ainsi, une faute grave peut ĂŞtre dĂ©classĂ©e en une faute simple. Mais peuvent-ils alourdir la qualification de la faute ? Juger que le licenciement repose sur une faute grave par exemple ?Â
Pouvoir disciplinaire : évaluer la gravité de la faute
Votre pouvoir disciplinaire vous permet de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer le bon fonctionnement de l’entreprise.
En cas de manquement à ses obligations professionnelles, un salarié peut être sanctionné. Bien entendu la sanction disciplinaire doit être proportionnée aux faits reprochés.
Il vous revient d’évaluer le degrĂ© de gravitĂ© de la faute commise et de voir si ce comportement fautif peut justifier un licenciement pour cause rĂ©elle et sĂ©rieuse ou pour faute grave. Â
Rappel
Pour être qualifié de faute grave, le comportement fautif du salarié doit être d’une importance telle qu’il rend impossible son maintien dans l’entreprise, et ce, même pendant la durée de son préavis.
Pouvoir disciplinaire : étendue du pouvoir de requalification des juges
La lettre de licenciement fixe les limites du litige. En cas de contentieux, seuls les motifs énoncés dans cette lettre pourront être invoqués devant le juge.
En cas de litige sur la qualification de la gravité de la faute, il revient au juge de donner aux faits invoqués, au soutien du licenciement, leur véritable qualification.
Ainsi, s’il estime que le degrĂ© de qualification retenu est trop sĂ©vère au regard des faits invoquĂ©s, le juge peut requalifier un licenciement pour faute grave en licenciement pour cause rĂ©elle et sĂ©rieuse.Â
Mais l’inverse n’est pas possible. Le juge ne peut pas aggraver la qualification de la faute qui est retenue par l’employeur.
Dans une affaire jugĂ©e le 22 janvier 2025, le salariĂ© qui avait profĂ©rĂ© des insultes racistes Ă l’encontre de ses collègues, avait Ă©tĂ© licenciĂ©. L’employeur n’avait pas qualifiĂ© de faute grave les faits reprochĂ©s. Le salariĂ© avait saisi la justice de diverses demandes notamment de juger son licenciement sans cause rĂ©elle et sĂ©rieuse.Â
La cour d’appel avait aggravĂ© la sanction en jugeant le licenciement fondĂ© sur une faute grave en raison des faits reprochĂ©s au salariĂ©.Â
La Cour de cassation censure cette dĂ©cision. Le juge ne peut en aucun cas requalifier un licenciement prononcĂ© pour cause rĂ©elle et sĂ©rieuse en licenciement pour faute grave, et ce, mĂŞme si les faits sont constitutifs d’une faute grave.Â
Pour plus de précisions sur la procédure de licenciement disciplinaire, les Editions Tissot vous recommandent la documentation « Gérer le personnel ACTIV » qui comprend la procédure interactive « Sanctionner un salarié : de l’avertissement au licenciement disciplinaire ».
Cour de cassation, chambre sociale, 22 janvier 2025, n° 23-15.397 (la lettre de licenciement fixe les limites du litige. Ainsi, le juge ne peut aggraver la qualification de la faute retenue par l'employeur)
Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot
- Transfert de données confidentielles par un salarié : gare à ne pas sanctionner trop lourdementPublié le 5 mai 2025
- Une liaison entre deux salariés qui finit mal peut conduire au licenciement disciplinairePublié le 7 avril 2025
- Faute du salarié : les faits ne peuvent lui être reprochés si ses facultés de discernement étaient altéréesPublié le 31 mars 2025
- Droit à la preuve : la recevabilité des mails provenant d’une messagerie personnellePublié le 24 mars 2025
- Alcool au travail : faut-il tenir compte du taux d’alcoolémie avant d’envisager le licenciement ?Publié le 7 mars 2025