L’employeur doit-il vous consulter en cas d’impossibilité de reclassement du salarié inapte ?
Lorsqu’un salarié est déclaré inapte, vous devez être consulté sur les propositions de reclassement que l’employeur souhaite soumettre au salarié. Cependant, qu’en est-il de cette obligation lorsque l’employeur se trouve dans l’impossibilité de proposer une alternative ?
Consultation du CSE en cas d’inaptitude : un préalable obligatoire à la transmission d’une proposition de reclassement
L’employeur ne peut procĂ©der au licenciement d’un salariĂ© inapte que s’il se trouve dans l’une des situations suivantes :Â
- expressément dispensé, par le médecin du travail, de l’obligation de reclasser le salarié ;
- impossibilité de procéder au reclassement du salarié ;
- refus, par le salarié, de sa ou de ses offres de reclassement.
Pour mémoire, l’obligation de reclassement exige de l’employeur qu’il propose au salarié inapte un autre emploi :
- approprié à ses capacités ;
- aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de certaines mesures (ex : aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail) ;
- disponible au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant.
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De même, il revient à l’employeur, pour soumettre une offre de reclassement avec sérieux et loyauté, de prendre en considération les conclusions écrites du médecin du travail ainsi que l’avis émis par son comité social et économique (CSE). C’est à la condition, bien entendu, qu’une telle instance soit instituée au sein de l’entreprise.
Votre avis  doit ĂŞtre recueilli que l’inaptitude soit d’origine professionnelle, c’est-Ă -dire consĂ©cutive Ă un accident du travail ou une maladie professionnelle, ou non professionnelle.Â
Votre consultation doit ĂŞtre menĂ©e Ă un moment bien prĂ©cis. C’est-Ă -dire entre la dĂ©claration d’inaptitude du salariĂ© et la transmission d’une proposition de reclassement Ă ce dernier.Â
Notez le
Cet avis n’est que consultatif.
A dĂ©faut de consultation, ou en cas de consultation irrĂ©gulière, l’employeur manque Ă son obligation de reclassement et prive, consĂ©quemment, le licenciement de cause rĂ©elle et sĂ©rieuse.Â
Important
Si l’entreprise dispose d’établissements distincts, l’employeur doit recueillir l’avis du CSE de l’établissement dans lequel travaille le salarié.
Mais qu’en est-il lorsque l’employeur constate, faute de poste disponible, qu’il est dans l’impossibilité de reclasser un salarié inapte ? Cette circonstance l’autorise-t-elle à engager une procédure de licenciement sans vous consulter au préalable ?
Ces questionnements, qui refont surface à intervalles réguliers, conduisent la Cour de cassation à rappeler régulièrement sa position : non, cette situation ne libère pas l’employeur de cette formalité consultative.
Consultation du CSE en cas d’inaptitude : une obligation valable même en cas d’impossibilité de reclassement
Dès lors que l’employeur n’est pas expressĂ©ment exemptĂ© de son obligation de reclassement et qu’un CSE est Ă©tabli dans l’entreprise, il doit procĂ©der Ă une consultation de l’instance. Et ce, mĂŞme s’il constate ne pas ĂŞtre en mesure de proposer un poste de reclassement au salariĂ©.Â
Dans cette situation,votre avis doit ĂŞtre sollicitĂ© entre la dĂ©claration d’inaptitude du salariĂ© et sa convocation Ă l’entretien prĂ©alable au licenciement.Â
Ces solutions, solidement Ă©tablies en jurisprudence, ont Ă©tĂ© rappelĂ©es par la Cour de cassation Ă travers un arrĂŞt rendu le 5 mars 2025.Â
Dans la prĂ©sente affaire, un employeur n’était pas en capacitĂ© de proposer Ă un salariĂ© inapte un poste de reclassement n’impliquant aucune mobilitĂ© gĂ©ographique. Ce qui, en l’occurrence, contrevenait au souhait que ce dernier avait formulĂ© dans les jours suivant la reconnaissance de son inaptitude.Â
Estimant que la consultation des reprĂ©sentants du personnel avait Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e de manière irrĂ©gulière, principalement en raison de sa tardivetĂ©, le salariĂ© avait saisi le juge prud’homal.Â
A hauteur d’appel, les juges avaient considĂ©rĂ© que l’impossibilitĂ©, pour l’employeur, de soumettre une offre de reclassement conforme au vĹ“u du salariĂ© l’exemptait de toute consultation des reprĂ©sentants du personnel.Â
Un raisonnement logiquement censurĂ© par la Cour de cassation.Â
Il reste dorĂ©navant Ă dĂ©terminer si la tardivetĂ© de cette consultation rendait effectivement le licenciement irrĂ©gulier. Or sur ce sujet, une rĂ©ponse positive semble s’imposer dans la mesure oĂą l’avis du comitĂ© avait Ă©tĂ© recueilli le jour mĂŞme de la notification du licenciement.Â
Notez le
Il a pu ĂŞtre admis par les juges que l’employeur dispensĂ© de son obligation de reclassement Ă©tait dispensĂ©, par la mĂŞme occasion, de l'obligation de vous consulter.Â
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Cour de cassation, chambre sociale, 5 mars 2025, n° 23-13.802 (l'employeur doit consulter les représentants du personnel sur les possibilités de reclassement même s’il ne peut pas proposer un poste compatible avec les exigences géographiques du salarié)
Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot
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