L’actualité sociale de la semaine : faute grave, obligation de sécurité, rémunération variable et objectifs

Publié le 24/11/2023 à 10:07 dans Comité social et économique (CSE).

Temps de lecture : 3 min

Si l’employeur tarde trop pour procéder à un licenciement pour faute grave celui-ci peut-il être remis en cause ? L’obligation de sécurité de l’employeur peut-elle être mise en jeu même si le salarié a eu un comportement imprudent ? L’employeur peut-il modifier unilatéralement les objectifs d’un salarié ? Réponse avec 3 décisions récentes.

Faute grave

Un licenciement pour faute grave doit, en raison de l’intensité des manquements le justifiant, être engagé dans un délai restreint. Au fil des contentieux, la Cour de cassation a notamment pu considérer que la faute grave :

  • ne pouvait être retenue si l’employeur avait convoqué le salarié plus de 3 semaines après sa prise de connaissance des faits ;
  • pouvait être retenue si l’employeur avait immédiatement notifié au salarié sa mise à pied conservatoire, et ce, même s’il avait accordé à ce dernier des indemnités auxquelles il n'aurait normalement pas pu prétendre ;
  • pouvait être retenue si l’employeur avait tenté d’aboutir, dans un premier temps, à un départ négocié ;
  • pouvait être retenue si le salarié était absent de l’entreprise en raison de la suspension de son contrat de travail.

Dans une nouvelle affaire, la Cour de cassation vient de juger que l’employeur agit bien dans le délai restreint dès lors qu’il a convoqué et mis à pied à titre conservatoire le salarié dans les 8 jours ouvrables suivants sa prise de connaissance des faits (Cass. soc., 8 novembre 2023, n° 22-10.167).

Obligation de sécurité

L’employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la santé physique et mentale et assurer la sécurité de ses salariés. Tout manquement à cette obligation peut constituer une faute inexcusable et engager la responsabilité de l’employeur comme l’illustre une affaire récente.

En l’espèce un salarié embauché par une association pour un programme d’éducation à Haïti contracte au cours du mois suivant une maladie de l’intestin, l’amibiase. Après son licenciement, il décide de demander des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité. Il reproche notamment à son employeur :

  • ses mauvaises conditions de travail et d'hébergement ;
  • de lui avoir fourni un matériel défectueux de filtration de l'eau, ce qui avait été à l'origine de la maladie tropicale qu'il avait contractée ;
  • et de ne pas lui avoir apporté de l’aide après sa maladie.

La cour d’appel rejette sa demande au motif qu’il ne rapporte pas la preuve que l’employeur lui a fait boire de l'eau de ville mal filtrée et qu’en outre il est notoire que l’eau de ville en Haïti n’est pas potable ; elle estime donc que le salarié a manqué à cette obligation de prudence élémentaire.

Mais la Cour de cassation n’est pas du même avis. Ce qu’il fallait établir c’est si l’employeur a pris toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé du salarié. Pas si le salarié a été imprudent (Cass. soc., 15 novembre 2023, n° 22-17.733).

Fixation des objectifs

Les salariés peuvent percevoir une rémunération mensuelle fixe et une part variable dont le montant est fixé en fonction d’objectifs individuels.

L’employeur peut fixer unilatéralement ces objectifs qui doivent alors être réalistes et réalisables.

Il est admis que l’employeur puisse modifier les objectifs qu’il a définis unilatéralement.

La Cour de cassation vient toutefois de rappeler que les objectifs modifiés doivent être réalisables et portés à la connaissance du salarié au début d'exercice. En cas de litige c’est à l’employeur de rapporter la preuve de ce que les objectifs qu'il fixe unilatéralement sont réalisables (Cass. soc., 15 novembre 2023, n° 22-11.442).

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