Grève : l’occupation des locaux ne doit pas entraver la liberté de travailler et de circuler

Publié le 18/10/2024 à 09:05
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Temps de lecture : 3 min

Le droit de grève constitue un droit fondamental à valeur constitutionnelle. S’il est manifeste qu’au fil de la jurisprudence, un dôme protecteur s’est érigé autour de l’exercice de ce droit, ce dernier ne demeure pas pour autant absolu.

Droit de grève : un droit fondamental protégé

La grève est définie par la jurisprudence comme une cessation collective et concertée du travail en vue d'appuyer des revendications professionnelles (Cass, soc., 2 février 2006, n° 04-12.336). 

Les salariés exerçant sans abus leur droit de grève, dans le strict cadre défini ci-dessus, bénéficient d’un régime protecteur. En effet, l'exercice du droit de grève, dans le cadre d’un mouvement licite :

  • ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salariĂ©, tout licenciement prononcĂ© en absence de faute lourde Ă©tant nul de plein droit ;
  • ne peut donner lieu Ă  aucune mesure discriminatoire notamment en matière de rĂ©munĂ©rations et d'avantages sociaux.

Toutefois, les grévistes ne peuvent pas disposer des locaux professionnels comme bon leur semble. 

Dès lors, si la grève implique généralement l’occupation des locaux professionnels ou la mise en œuvre de piquets de grève à l’entrée des locaux, de telles pratiques ne doivent pas porter atteinte à la liberté du travail des autres salariés non-grévistes, notamment en leur empêchant d’entrer dans l’entreprise.

Pour mettre fin à un tel mouvement, l’employeur peut être fondé à demander au juge des référés l'expulsion des grévistes. 

Droit de grève : il ne peut porter atteinte aux libertés d’aller, de venir et d’entreprendre

En l’espèce, 40 salariés grévistes d’une entreprise ont bloqué à l'aide de chariots la sortie des caisses d’un magasin, ainsi que l'entrée principale de l'hypermarché de manière à en interdire l'accès aux clients. Tout en dissuadant ceux qui tentaient de forcer le passage, ces mêmes salariés ont placé des cagettes en bois devant l'entrée générale du magasin, faisant rebrousser chemin à la plupart des clients.

Suite à cela, le juge des référés, alors saisi par l’employeur :

  • a ordonnĂ© de mettre fin Ă  ces blocages ;
  • et prononcĂ© une interdiction, Ă  ces salariĂ©s, et Ă  toute personne prenant part au mouvement actuel ou agissant de concert avec eux, d'entraver par quelque moyen que ce soit, mĂŞme partiellement, l'ensemble des accès du magasin sous astreinte.

Le syndicat initiateur du mouvement conteste en justice ces mesures, considérant qu’elles portaient atteinte à leur droit de grève.

Pour la Cour de cassation, en agissant de la sorte, le personnel gréviste avait, par ses actions de blocage, porté atteinte à la liberté d'aller et venir des clients, ainsi qu’à à la liberté du travail de leurs collègues et à la liberté d'entreprendre, le tout étant bien constitutif d’un trouble manifestement illicite auquel il devait être mis fin.

La Cour de cassation rappelle que les mesures d’interdiction prises doivent être proportionnées par rapport au but recherché, à savoir empêcher les débordements. Dès lors, elle confirme qu’il n’y avait pas lieu :

  • d’étendre celles-ci Ă  toute personne prenant part au mouvement. Les mesures doivent concerner des personnes identifiĂ©es, ayant effectivement pris part aux actions de blocage ;
  • d'interdire Ă  ces salariĂ©s de pĂ©nĂ©trer dans le magasin bloquĂ© ou sa galerie marchande, et de s'y maintenir dans des conditions Ă©trangères Ă  l'exercice de leur activitĂ© salariĂ©e au sein de l'entreprise.

Pour en savoir plus sur le droit de grève et sur le rôle des représentants du personnel en la matière, nous vous recommandons notre documentation « CSE ACTIV » et notamment la fiche « Intervenir au cours d'un conflit collectif ou d'une grève ».


Cour de cassation, chambre sociale, 10 juillet 2024, n° 22-24.499 (l’exercice du droit de grève trouve sa limite dans le respect des libertés d’aller, de venir et d’entreprendre)

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Florent Schneider

Juriste et Responsable Pôle Droit social chez Wagner et Associés

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