Conventions collectives : recueillir l'avis des représentants du personnel avant de licencier, mais à quel moment ?

Publié le 13/03/2023 à 09:27 dans Conventions collectives.

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Certaines dispositions conventionnelles sont moins claires que d'autres... c'est ainsi qu'elles entraînent des litiges devant les prud'hommes. La Cour de cassation vient à nouveau de rappeler la marche à suivre pour interpréter ces dispositions qui manquent de clarté.

Conventions collectives : lorsque les dispositions conventionnelles portent Ă  confusion

Une salariée, guichetière au sein d'une banque, avait saisi les prud'hommes suite à son licenciement pour inaptitude. La salariée estimait que son employeur n'avait pas respecté les dispositions conventionnelles en matière de licenciement non disciplinaire.

Il s'agissait ici de la convention collective du Crédit agricole, qui prévoit (art. 14, dans sa rédaction antérieure à l'avenant du 21 décembre 2018) : « le licenciement pour un motif autre que disciplinaire ne peut être effectué qu'après avis des délégués du personnel du collège auquel appartient l'intéressé ».

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Suite à la réforme des institutions représentatives du personnel, cet article prévoit aujourd'hui que l'avis à recueillir est celui « d’une partie des membres du comité social et économique (CSE), du collège auquel appartient l’intéressé ».

La salariée estimait que son employeur n'avait pas respecté le timing prévu par le texte.

En effet, il avait engagé la procédure de licenciement par convocation du 3 janvier à un entretien préalable prévu le 11 janvier. La consultation des délégués du personnel n'était intervenue que le 25 janvier, soit quelques jours avant le licenciement. Trop tard, selon la salariée, pour qui cette consultation aurait dû intervenir en amont.

Une interprétation validée par les juges d'appel. Pour les juges, la consultation des délégués du personnel prévue par le texte conventionnel devait intervenir après la constatation de l'inaptitude par le médecin du travail, avant la proposition effective d'un poste de reclassement et avant la convocation de la salariée à l'entretien préalable. Les juges ont donc estimé que, faute d'avoir respecté la procédure conventionnelle, le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

Conventions collectives : l'avis des représentants du personnel doit seulement être préalable à la décision de l’employeur de licencier

Mais la Cour de cassation n'a pas suivi l'avis des premiers juges.

La Cour rappelle d'abord les principes à appliquer lorsqu'une convention collective manque de clarté : elle doit être interprétée comme la loi, c'est à dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte.

Puis, la Cour de cassation cite la disposition conventionnelle litigieuse : le licenciement pour un motif autre que disciplinaire ne peut être effectué qu'après avis des délégués du personnel du collège auquel appartient l'intéressé.

Pour la Cour, il résulte de cette disposition que l'avis des délégués du personnel n'a pas à être préalable à l'entretien préalable, mais uniquement à la prise de décision par l'employeur de licencier.

Dans cette affaire, le timing était bon, et c'est donc à tort que les juges d'appel avaient invalidé le licenciement de la salariée. L'affaire devra être à nouveau jugée.


Cour de cassation, chambre sociale, 8 février 2023, n° 21-15.314 (selon l'article 14 de la convention collective nationale du Crédit agricole, le licenciement pour un motif autre que disciplinaire ne peut être effectué qu'après avis des délégués du personnel du collège auquel appartient l'intéressé. Il résulte de cette disposition que l'avis des délégués du personnel n'a pas à être préalable à l'entretien préalable, mais uniquement à la prise de décision par l'employeur de licencier)