Discrimination fondée sur le handicap : le refus de suivre une préconisation du médecin du travail peut laisser supposer son existence

Publié le 10/04/2025 à 15:00
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Temps de lecture : 3 min

L'employeur doit adopter, lorsque la situation le justifie, des mesures d'aménagement pour permettre à un travailleur handicapé d'exercer son emploi. Son inaction risque, à défaut, d'être assimilée à une discrimination. Le salarié s'en estimant victime pourra alors faire présumer son existence en mettant en avant que l'employeur n'a pas suivi une préconisation du médecin du travail.

Discrimination : une charge de la preuve répartie entre le salarié et l'employeur

L’embauche de travailleurs handicapés commande à l’employeur de prendre, en fonction de besoins révélés par une situation concrète, des mesures appropriées d'aménagement pour permettre à ces derniers d’exercer ou de conserver leur emploi. 

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Ces mesures doivent être concrétisées sous réserve d’être raisonnables, c’est-à-dire sous réserve que les charges attachées à leur mise en œuvre ne soient pas disproportionnées.

En refusant d’adopter de telles mesures, l’employeur s’expose au risque de commettre une discrimination. 

Le salarié s’en prétendant victime pourra alors agir en justice pour solliciter la réparation financière de son préjudice. 

Devant le juge prud’homal, il appartiendra à ce dernier, dans un premier temps, de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une telle discrimination. L’objectif étant, comme l’indique le Défenseur des Droits, de « faire naître un doute raisonnable dans l’esprit du juge » et de le « convaincre que l’une des possibles explications au traitement subi est (…) une décision discriminatoire ». 

A charge pour l’employeur, dans un second temps, de renverser cette présomption en démontrant que sa décision était justifiée par des éléments objectifs.

Non-respect d’une préconisation d’aménagement du médecin du travail : l’existence d’une discrimination peut être présumée

La Cour de cassation a eu l’opportunité, à travers une décision publiée le 2 avril 2025, de rappeler que l’existence d’une discrimination peut être présumée lorsque l’employeur refuse de suivre une préconisation d’aménagement formulée par le médecin du travail.

Dans l’affaire soumise à son appréciation, un employeur avait refusé, malgré l’avis du médecin du travail, de mettre un fauteuil ergonomique à la disposition d’une travailleuse handicapée, alors embauchée en CDD.

Se considérant victime d’une discrimination en raison de son handicap, cette dernière mettait en avant que :

  • l’échĂ©ance prochaine de son contrat de travail ne permettait pas, comme le soutenait l’employeur, de justifier la non-fourniture de ce siège ;
  • l’une de ses collègues s’était vue fournir un siège aux caractĂ©ristiques identiques (rĂ©glable en hauteur, dotĂ© d'un appui lombaire, d'accoudoirs et de repose-pieds).

Les premiers juges vont, à tort, débouter la salariée de sa demande. La cour d’appel de Douai considérant, au passage, que le non-respect de cette préconisation permettait, tout au plus, de faire état d’un manquement de l’employeur à ses obligations contractuelles.

Pour la Cour de cassation, les éléments fournis par la salariée permettaient, au contraire, de laisser supposer l’existence d’une discrimination. L’affaire devra donc être rejugée. 

Pour neutraliser cette présomption établie par la salariée, l’employeur pourrait tenter de faire valoir que son inaction était justifiée par :

  • l'impossibilitĂ© matĂ©rielle de prendre la mesure prĂ©conisĂ©e ; 
  • le caractère disproportionnĂ© des charges consĂ©cutives Ă  leur mise en Ĺ“uvre.

Cependant, le caractère raisonnable de cette mesure d’aménagement qui, de surcroît, a été appliquée au profit d’une autre salariée nous permet d’émettre de sérieux doutes quant à la recevabilité de tels arguments pour cette affaire. 

Cour de cassation, chambre sociale, 2 avril 2025, n° 24-11.728 (la cour d’appel ayant constaté que la préconisation du médecin du travail n’avait pas été suivie par l’employeur doit en déduire que la salariée fournissait des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination)

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Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot

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