AT/MP : faute inexcusable et inopposabilité, une jonction aux enjeux distincts

Publié le 25/03/2025 à 15:22
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Temps de lecture : 5 min

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Le système judiciaire français est réputé pour sa densité et sa complexité. Tant et si bien que les juges s’y perdent parfois eux-mêmes. Illustration avec la cour d’appel d’Amiens qui, saisie de deux affaires distinctes, l’une portant sur la faute inexcusable de l’employeur, l’autre sur l’inopposabilité d’une décision de prise en charge, a involontairement porté atteinte au principe du droit à un recours effectif. 

L’inopposabilité : un contentieux initié par l’employeur

Lorsque la CPAM prend en charge un sinistre au titre de la législation professionnelle, l’employeur a la possibilité de contester cette décision dans un délai de 2 mois. 

Il sollicite alors l’inopposabilité de la décision et ses arguments peuvent reposer, entre autres, sur l’absence de caractère professionnel de l’accident ou de la maladie et/ou sur le non-respect du principe du contradictoire à son égard par la CPAM.

Rappel

Le principe du contradictoire garantit aux parties qu’elles ne peuvent pas être jugées sans avoir été entendues ou a minima appelées. Il induit aussi que chaque partie a le droit de prendre connaissance des arguments de fait, de droit et de preuve à partir desquelles elle sera jugée.

Une fois l’inopposabilité obtenue, l’employeur peut solliciter une baisse de ses taux de cotisations AT/MP. 

En raison de l’indépendance des rapports entre la CPAM et l’employeur, d’une part, et entre la CPAM et l’assuré, d’autre part, le salarié reste normalement à l’écart de ce contentieux. Il n’est pas impacté par la décision des juges dans la mesure où la prise en charge de son sinistre est définitive à son égard. L’action de l’employeur en inopposabilité n’a donc aucune incidence sur les droits acquis des salariés.

La faute inexcusable : un contentieux initié par le salarié

Le salarié victime d'un sinistre professionnel a droit à une indemnisation forfaitaire par la Sécurité sociale au titre du régime spécial des accidents du travail, ce qui lui interdit d'engager la responsabilité de l'employeur en réparation du préjudice subi. 

Il existe toutefois une exception lorsque le salarié victime considère que son sinistre résulte de la faute inexcusable de son employeur. Autrement dit, que son employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. 

L’intérêt pour la victime est d’obtenir une majoration de sa rente et la réparation de ses préjudices devant le juge. 

En pratique, en cas de condamnation de l’employeur, c’est la CPAM qui avance les frais au salarié victime d’une telle faute. Charge ensuite à l’employeur de les rembourser.

Notez le

La jurisprudence rappelle régulièrement que le sens de la décision prise par la CPAM (accord ou refus de prise en charge) est sans incidence sur l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur exercée par la victime. 

L’articulation entre la faute inexcusable et l’inopposabilité

Fût un temps, lorsque l’employeur avait obtenu devant le juge l’inopposabilité d’un sinistre professionnel, cela lui permettait d’obtenir l’inopposabilité de toutes les conséquences financières liées à la reconnaissance d’une faute inexcusable. Autrement dit, la CPAM se retrouvait contrainte d’assumer seule la charge financière d’une telle faute puisqu’elle ne pouvait pas obtenir de remboursement auprès de l’employeur.

Cette situation a toutefois pris fin le 1er janvier 2013, l’article L. 452-3-1 du Code de la sécurité sociale ayant instauré le principe selon lequel toute inopposabilité obtenue en raison du non-respect du principe contradictoire ne peut empêcher l’employeur de s’acquitter des conséquences financières d’une faute inexcusable. Ce qui, a contrario, signifie que l’employeur peut invoquer l’inopposabilité obtenue sur le caractère professionnel du sinistre pour convaincre le juge saisi de la faute inexcusable.

En tout état de cause, la reconnaissance de la faute inexcusable, qui est indépendante de la prise en charge au titre de la législation professionnelle, n’implique pas que l’accident ait été préalablement déclaré à la caisse par la victime. En effet, le tribunal judiciaire est en mesure, après débat contradictoire, de rechercher si l’accident ou la maladie présente un caractère professionnel, et si le salarié établit avoir été victime d’une faute inexcusable de l’employeur.

La jonction des procédures ne fait pas disparaître leur caractère distinct

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