Consultation du CSE d'établissement sur des mesures décidées au niveau de l'entreprise : gare aux méprises !

Publié le 16/09/2022 à 07:51, modifié le 25/10/2022 à 15:16 dans Comité social et économique (CSE).

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Si le CSE d'établissement dispose d’attributions similaires à celles du CSE d'entreprise, il n'en demeure pas moins que celles-ci s'exercent strictement dans la limite des pouvoirs confiés au chef d'établissement. Ses prérogatives consultatives ne dérogent pas à cette règle, toute consultation potentielle portant sur quelconque mesure et/ou aménagement important décidé au niveau de l'entreprise étant soumise à deux conditions particulières. Mais quelles sont-elles ?

La consultation du CSE d'établissement ne s’impose qu'à l'occasion de la mise en œuvre de mesures dites « spécifiques »…

Dans une affaire récente, une société avait élaboré un plan de reprise d'activité définissant les modalités dites de sortie progressive du confinement, à compter du mois de mai 2020. Ce plan avait été présenté pour consultation au CSE central début mai 2020. Mais le 10 juin 2020, après transmission de trois documents et d'un ensemble de fiches réflexes élaborés par l'une des directions régionales à son comité d’établissement, ce dernier décida d'enjoindre la société à régulariser le processus de consultation engagé, considérant devoir être informé et consulté sur les mesures alors mises en œuvre.

A titre d'argument, ce dernier soutenait que, « le plan de reprise d'activités élaboré par cette direction était une mesure d'adaptation spécifique du cadrage national relevant de la compétence et du pouvoir du chef d'établissement et un aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des agents ».

Ainsi, au titre de ces mesures considérées par lui comme propres à l'établissement, il estimait devoir être consulté.

Or, si la condition afférente à la présence de mesures spécifiques relevant de la compétence du chef d'établissement comme génératrice de l'obligation de consultation du CSEE n'est absolument pas remise en cause par la cour d'appel, c'est la présence de telles mesures dans les documents produits par la direction régionale qui s’avère in fine être débattue.

En effet et à l'inverse des potentiels éléments mis en avant par le CSEE, la cour d'appel, rejointe ainsi par la Cour de cassation, considère en substance que les documents produits par la Direction régionale ne font état que de règles/mesures « communes », s'inscrivant dans un « cadre de cohérence national » et/ou « déclinant sans subsidiarité le projet de reprise d'activité de la société ».

…Et à l'occasion de la mise en œuvre de mesures, en vertu desquelles le chef d'établissement pourrait exercer un pouvoir de décision

Le CSEE soutenait que, le retour progressif des ressources humaines, sous tendu à « une différenciation par territoires (rouge/vert) » ainsi qu'à la nécessaire prise en compte, lors de la mise en œuvre de ses mesures, du contexte local de chaque direction, suffisait à caractériser le pouvoir de décision de ces dernières contraintes à l'aménagement. Les juges ne l'entendirent pas de la même oreille.

Il sera relevé par deux fois : « qu'aucun élément ne permet d'établir que le chef d'établissement disposait d'une quelconque marge de manoeuvre dans l'exercice de son pouvoir de décision quant aux modalités de la reprise de l'activité au sein de son établissement telles qu'elles avaient été arrêtées au niveau de l'entreprise ».

Gare donc aux piégeuses formules textuelles, les deux conditions sus étudiées et relevant de l'existence de mesures particulières et propres, suscitant de surcroît une certaine latitude de décision de la direction d'établissement étant appréciées strictement.


Cour de cassation, chambre sociale., 29 juin 2022, n° 21-11.935 (le CSE d'établissement est informé et consulté sur toute mesure d'adaptation, relevant de la compétence de ce chef d'établissement et spécifique à cet établissement, des aménagements importants modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail arrêtés au niveau de l'entreprise, dès lors que cette mesure d'adaptation n'est pas commune à plusieurs établissements)

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Stéphanie Roujon-Paris

De formation supérieure en droit social éprouvée, sur le terrain, par des années d'application quotidienne du droit du travail, des relations sociales et de la négociation collective, j’ai toujours …