Travail le 1er mai : vers un élargissement du périmètre des établissements et services autorisés ?
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Vous avez peut-ĂŞtre Ă©tĂ© surpris d'apprendre que, chaque annĂ©e, des gĂ©rants de boulangerie sont verbalisĂ©s pour avoir fait travailler leurs salariĂ©s le 1er mai. Et pourtant, certains d'entre eux ne sont, en effet, pas autorisĂ©s Ă dĂ©roger Ă l'obligation de chĂ´mage de ce jour fĂ©riĂ©. Deux sĂ©nateurs, jugeant ce cadre juridique inadaptĂ© aux rĂ©alitĂ©s du terrain, ont dĂ©posĂ© une proposition de loi pour faire Ă©voluer les règles en la matière.Â
Travail le 1er mai : de nombreux établissements placés en situation d'insécurité juridique
Associés à la célébration de la fête nationale, d’une fête religieuse ou encore à la commémoration d’un évènement historique, les jours fériés arrêtés par le Code du travail s’établissent au nombre de 11 (art. L. 3133-1).
Pour autant, leur chĂ´mage n’est pas systĂ©matique. En effet, en l’absence de disposition conventionnelle contraire, seul le 1er mai ne doit pas ĂŞtre travaillĂ© (art. L. 3133-4 et suivants).Â
Une exception à cette règle existe néanmoins à l’endroit des établissements et services qui, en raison de la nature de leur activité, ne peuvent interrompre le travail. Aussi, en cas de 1er mai travaillé, les salariés percevront une rémunération doublée.
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La violation des dispositions prĂ©citĂ©es expose l’employeur Ă une amende de 750 €, applicable autant de fois qu’il y aura de salariĂ©s concernĂ©s.Â
La liste des activités visées par cette dérogation n’a, en revanche, jamais été arrêtée. Un silence qui, bien que sans incidence à l’égard de certaines activités logiquement concernées (ex : hôpitaux, EPHAD, transports, gardiennage, hôtellerie), a laissé d’autres secteurs en proie à un véritable flou juridique (ex : boulangeries, fleuristes, etc.).
Et pour cause, en 1980, le ministre du Travail de l’époque, Jean Mattéoli, avait indiqué, en réponse à une question parlementaire, que les établissements « bénéficiant du droit d’accorder le repos hebdomadaire par roulement », à l’instar des boulangeries et des fleuristes, pouvaient se prévaloir de la dérogation à l’obligation de ne pas travailler le 1er mai.
Une prise de position qui, six ans plus tard, avait fondĂ© l’entrĂ©e en application d’une tolĂ©rance administrative arrĂŞtĂ©e par Martine Aubry, alors Directrice des relations du travail au sein du ministère du Travail.Â
Rappel
Sont autorisés à déroger à la règle du repos dominical, par l’attribution d’un repos hebdomadaire par roulement, les établissements dont le fonctionnement ou l'ouverture est rendu nécessaire par les contraintes de la production, de l'activité ou les besoins du public (art. L. 3132-12 du Code du travail).
Seulement, cette position a Ă©tĂ© profondĂ©ment mise Ă mal par la Cour de cassation qui, dans un arrĂŞt du 14 mars 2006, a jugĂ© qu’il appartenait Ă celui se prĂ©valant de cette dĂ©rogation de dĂ©montrer « que la nature de l’activitĂ© ne permet pas d’interrompre le travail le jour du 1er mai » (n° 05-83.436).Â
Depuis lors, et en dépit de l’adoption de nombreuses réformes en droit du travail, le législateur n’a jamais opéré d’arbitrage. Une inertie qui, comme ce fut le cas l’année dernière, n’a cessé d’exposer certains établissements, comme les boulangeries, à des risques de verbalisation et de poursuites.
Afin de clarifier dĂ©finitivement ce sujet, la sĂ©natrice Annick Billon et le sĂ©nateur HervĂ© Marseille ont soumis, le 25 avril 2025, une proposition de loi au SĂ©nat.Â
De nouveaux salariés bientôt autorisés à travailler le 1er mai ?
La proposition de loi dĂ©posĂ©e par les sĂ©nateurs centristes entend, Ă travers son article unique, Ă©largir la dĂ©rogation au chĂ´mage du 1er mai aux salariĂ©s appartenant Ă un Ă©tablissement « dont le fonctionnement ou l'ouverture est rendu nĂ©cessaire par les contraintes de la production, de l'activitĂ© ou les besoins du public ».Â
Dans le sillage de la position ministérielle exprimée dans les années 1980, les établissements ne pouvant interrompre le travail en raison de la nature de leur activité laisseraient donc place à ceux en droit déroger à la règle du repos dominical par l’attribution d’un repos hebdomadaire par roulement.
Du cĂ´tĂ© de l’exĂ©cutif, Catherine Vautrin, ministre du Travail, a indiquĂ© Ă l’AFP que le Gouvernement allait soutenir cette proposition de loi. Pour autant, la procĂ©dure lĂ©gislative n’étant qu’à son commencement, l’entrĂ©e en vigueur de cette petite rĂ©volution ne pourrait intervenir, au plus tĂ´t, que le 1er mai 2026.Â
S’agissant du 1er mai 2025, la ConfĂ©dĂ©ration Nationale de la Boulangerie-Pâtisserie Française a, quant Ă elle, invitĂ© les entreprises Ă ne pas faire travailler leurs salariĂ©s. Toutes celles dĂ©rogeant Ă cette prĂ©conisation connaissent, dorĂ©navant, les risques qu’elles encourent.Â
Si vous avez des interrogations concernant le travail et l’indemnisation des jours fĂ©riĂ©s, les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Tissot Social Entreprise ACTIV ».Â
Proposition de loi visant Ă permettre aux salariĂ©s de certains Ă©tablissements et services de travailler le 1er mai, dĂ©posĂ©e au SĂ©nat le 25 avril 2025, envoyĂ©e Ă la commission des affaires socialesÂ
Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot
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