Projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2023 : les mesures sociales qui intéressent le BTP

Publié le 04/10/2022 à 07:55, modifié le 25/10/2022 à 15:16 dans Contrat de travail BTP.

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Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour l’année 2023 contient plusieurs mesures qui intéressent le BTP notamment sur la solidarité financière des donneurs d’ordre en cas de travail dissimulé ou sur les obligations de déclaration au titre des rémunérations dues à l’occasion des périodes de congés des salariés relevant des caisses de congés payés.

Proportionnalité des sanctions en cas de travail dissimulé dans le cadre de la solidarité financière des donneurs d’ordre (art. 6)

Le donneur d’ordre qui ne remplit pas ses obligations de vigilance est tenu solidaire avec son sous-traitant de payer ses sanctions, y compris les annulations d’exonérations et de réductions de cotisations sociales. Il se voit également appliquer cette annulation, une seconde fois, en propre, en tant que donneur d’ordre sans que cette sanction ne soit adaptée à la gravité des faits commis par le sous-traitant lorsque ce dernier bénéficie d’une modulation.

Partant de ce constat, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2023 prévoit donc de moduler la pénalité destinée au donneur d’ordre, en intégrant un élément de gravité dans la méconnaissance de son obligation de vigilance et dans le montant de la fraude :

  • pour un premier manquement : la pĂ©nalitĂ© encourue par le donneur d’ordre resterait plafonnĂ©e Ă  15 000 euros pour une personne physique et Ă  75 000 euros pour une personne morale, voire sous certaines conditions, le montant ne pourra pas dĂ©passer le montant de l’annulation de la rĂ©duction ou d’exonĂ©ration de cotisation mis Ă  sa charge au titre de la solidaritĂ© financière ;
  • en cas de rĂ©cidive, les plafonds ne s’appliqueraient plus. La sanction serait strictement proportionnĂ©e au montant mis Ă  sa charge au titre de la solidaritĂ© financière (Code de la SĂ©curitĂ© sociale, art. L. 133-4-5).

Le donneur d’ordre pourrait également bénéficier d’une réduction des majorations de 10 points s’il procède notamment rapidement au paiement des sommes dues (Code de la Sécurité sociale, art. L. 234-7-7).

Simplifier les corrections en cas d’anomalie dans les déclarations sociales nominatives (DSN) (art. 6)

Les employeurs sont tenus d’effectuer une régularisation lorsqu’une information inexacte ou incomplète est transmise au cours des mois précédents en DSN. En cas de constat d'anomalie par les organismes de la Sécurité sociale et les organismes et administrations destinataires des données de la DSN, les déclarants sont tenus d’effectuer les corrections demandées.

Le projet de loi prévoit une simplification des modalités de prise en compte, par l’URSSAF, des besoins de corrections en l’absence de correction spontanée par les employeurs, via une déclaration corrigée unique pour leur compte.

Ainsi, en cas d’inaction de l’employeur, l’URSSAF aurait la possibilité de procéder à ces corrections, en tenant compte des demandes signalées par les autres organismes ou administrations destinataires des données.

Autre mesure : les modalités de déclaration et de versement des cotisations dues sur certains revenus versés par des tiers pour le compte de l’employeur ou à l’occasion de la relation de travail devraient être simplifiées (1er janvier 2024).

Cela concerne notamment les employeurs du BTP qui sont tenus d’adhérer à une caisse de congés payés, qui verse les indemnités de congés payés. Un décret déterminera les modalités particulières selon lesquelles seraient remplies les obligations de déclaration au titre des rémunérations dues à l’occasion des périodes de congés des salariés relevant des caisses. Il prévoit, le cas échéant, les modalités des échanges d’informations entre ces caisses et les employeurs permettant la transmission, par une déclaration unique, de l’ensemble des données dont la déclaration est obligatoire.

Utilisation des informations obtenues dans le cadre du contrôle d’entreprises appartenant à un même groupe

Dans un souci d’éviter les demandes successives ou redondantes, les agents qui contrôleraient une entreprise appartenant au même groupe qu’une entreprise déjà contrôlée pourraient utiliser les informations obtenues à l’occasion de ce premier contrôle. En toute transparence vis-à-vis de l’entreprise, l’agent serait tenu d’informer la personne contrôlée de la teneur et de l’origine des documents ou informations obtenus. Sur la demande de la personne contrôlée, l’agent communiquerait une copie de ces documents.

Pérennisation de la limitation de la durée du contrôle dans les entreprises de moins de 20 salariés

Depuis 2015, la durée des contrôles URSSAF est encadrée dans les entreprises de moins de 10 salariés et pour les travailleurs indépendants. Sauf exception, cette durée ne peut s’étendre sur une période supérieure à 3 mois. Ce délai pouvant être prorogé une fois à la demande expresse de l’employeur ou de l’URSSAF et atteindre 6 mois au plus.

Attention

Aucune limite de temps s’applique lorsqu’il est établi au cours du contrôle l’une des situations suivantes :

  • travail dissimulé ;
  • obstacle au contrĂ´le ;
  • abus de droit ;
  • constat de comptabilitĂ© insuffisante ou documentation inexploitable.

Depuis août 2018, cette limitation de durée est appliquée, à titre expérimental pour une durée de 3 ans, aux entreprises de moins de 20 salariés.

La phase d’expérimentation a pris fin cet été même si en pratique, l’initiative a été maintenue et qu’elle est toujours mentionnée dans la charte du cotisant contrôlé.

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pérennise la mesure et prévoit que cette durée maximale du contrôle ne s’applique pas :

  • lorsque la documentation est transmise plus de 15 jours après la rĂ©ception de la demande faite par l’agent de contrĂ´le ;
  • en cas de report, Ă  la demande de la personne contrĂ´lĂ©e, d’une visite de l’agent chargĂ© du contrĂ´le.

Indemnisation des arrêts de travail liés au covid-19 (art. 16)

En cas de test PCR ou antigénique positif au Covid-19, les assurés se trouvant dans l’impossibilité de continuer à travailler, y compris à distance, continueraient de bénéficier du régime dérogatoire mis en place pendant la crise sanitaire :

  • arrĂŞt de travail Ă©tabli par l’Assurance maladie après dĂ©claration en ligne de l’assurĂ© ;
  • l’assurĂ© bĂ©nĂ©ficie des indemnitĂ©s journalières de SĂ©curitĂ© sociale sans que soient appliquĂ©s les conditions d’ouverture de droits, le dĂ©lai de carence de 3 jours et les durĂ©es maximales de versements des indemnitĂ©s journalières ;
  • cĂ´tĂ© employeur, les indemnitĂ©s complĂ©mentaires lĂ©gales sont versĂ©es sans que soient appliquĂ©s la condition d’anciennetĂ© (1 an dans l’entreprise), le dĂ©lai de carence (7 jours) et la prise en compte des durĂ©es d’indemnisation.

Important

Dans le BTP, le salarié peut prétendre soit au maintien légal soit au maintien conventionnel, en fonction du dispositif de maintien le plus favorable globalement pour lui. Pour les ouvriers, c'est le maintien légal qu'il convient d'appliquer compte tenu des aménagements prévus pour les arrêts dérogatoires Covid (maintien à 90 % pendant toute la durée de l'arrêt, sans délai de carence et sans condition d'ancienneté). Pour les ETAM et les cadres, il convient d'appliquer le maintien conventionnel (100 % pendant toute la durée de l'arrêt, sans délai de carence) si le salarié a au moins 1 an d'ancienneté dans l'entreprise ou 5 ans d'ancienneté, continus ou non, dans des entreprises du BTP. Si le salarié ETAM ou cadre ne dispose pas de l'ancienneté requise pour le maintien conventionnel, alors il convient de lui appliquer le maintien légal tel que prévu pour les arrêts dérogatoires (maintien à 90 % pendant toute la durée de l'arrêt, sans délai de carence et sans condition d'ancienneté).

Le projet de loi prévoit que le régime dérogatoire devrait s’appliquer jusqu’à une date fixée par décret et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023.

Bon Ă  savoir

Aucune prolongation ne semble en revanche envisagée pour le dispositif arrêt de travail garde d'enfants.

Subrogation obligatoire pour les indemnités de congés maternité, adoption et paternité (art. 37)

Afin de garantir la continuité des ressources des salariés pendant leur congé de maternité, d’adoption et de paternité et d’accueil de l’enfant, le projet de loi propose de systématiser la subrogation pour ces congés. En effet, selon l’étude d’impact du projet de loi, le délai de paiement moyen des indemnités aux assurés, en l’absence de subrogation, est de 31,5 jours en 2018.

Ainsi, l’employeur subrogé assurerait le maintien total ou partiel du salaire dès le premier cycle de paie suivant l’absence du salarié. Ce versement intègre un montant au moins égal aux indemnités journalières de Sécurité sociale qui sont dues au salarié.

La CPAM devra verser à l’employeur subrogé le montant des indemnités journalières dues dans un délai maximal fixé par décret. Un décret fixera également les catégories de salariés auxquels la subrogation ne s’appliquerait pas en raison des caractéristiques de leur contrat de travail.

La subrogation obligatoire entrerait en vigueur de façon échelonnée fixée en fonction de l’effectif des entreprises. Le calendrier sera fixé par décret et la mesure s’appliquera au plus tard le 1er janvier 2025.

Notez le

Il existe dans le BTP des dispositions conventionnelles concernant le maintien de salaire en cas de congé maternité. En revanche l’employeur n’a pas à majorer les indemnités journalières en cas de congé paternité. La mise en place d’une subrogation entraîne donc actuellement des complexités en matière de paie (notamment avec le traitement de la CSG-CRDS) qui rend son utilisation déconseillée actuellement. Plus de détails avec notre documentation « Responsable et gestionnaire paie BTP ».

Indemnisation des arrêts de travail prescrits par téléconsultation encadrés afin de limiter les abus (art. 43)

A compter du 1er juin 2023, les arrêts de travail prescrits à l’occasion d’une téléconsultation ne donneraient lieu à indemnité journalière que si l’incapacité physique a été constatée par le médecin traitant ou par un médecin ayant déjà reçu la personne en consultation depuis moins d’un an. Pour plus de précision, vous pouvez consulter l’article : Téléconsultation : retour en arrière pour limiter les arrêts de travail abusifs.


Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023 déposé le 26 septembre à l’Assemblée nationale