Démission : quand les manquements de l’employeur entrainent sa requalification en licenciement
Temps de lecture : 4 min
Pour ĂŞtre valable, une dĂ©mission doit en principe ĂŞtre claire et non Ă©quivoque. Qu’en est-il de la dĂ©mission qui impute la rupture du contrat Ă des fautes de l’employeur, et notamment le non-paiement d’heures supplĂ©mentaires  ?Â
Une démission qui doit être claire et non équivoque
Un salarié en CDI peut librement rompre son contrat en démissionnant, et ce sans avoir à motiver cette décision ni à recueillir votre accord.
Mais attention : la démission ne se présume pas. Il est donc essentiel de vérifier la volonté du salarié de mettre fin au contrat de travail.  En l’absence de volonté claire et non équivoque, les juges pourraient requalifier la rupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
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Bon Ă savoir
Il existe une exception. En effet, depuis le 19 avril 2023 , l’employeur qui constate l’abandon de poste d’un salarié peut légalement considérer que ce dernier est démissionnaire et notifier cette rupture à France Travail. Le salarié ne bénéficiera alors pas de l’assurance chômage (Code du travail, art. L. 1237-1-1 et R. 1237-13). Voir notre article : Abandon de poste : la présomption de démission est validée par le Conseil d’Etat
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Une démission qui doit être claire et non équivoque
Un salarié en CDI peut librement rompre son contrat en démissionnant, et ce sans avoir à motiver cette décision ni à recueillir votre accord.
Mais attention : la démission ne se présume pas. Il est donc essentiel de vérifier la volonté du salarié de mettre fin au contrat de travail.  En l’absence de volonté claire et non équivoque, les juges pourraient requalifier la rupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
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Bon Ă savoir
Il existe une exception. En effet, depuis le 19 avril 2023 , l’employeur qui constate l’abandon de poste d’un salarié peut légalement considérer que ce dernier est démissionnaire et notifier cette rupture à France Travail. Le salarié ne bénéficiera alors pas de l’assurance chômage (Code du travail, art. L. 1237-1-1 et R. 1237-13). Voir notre article : Abandon de poste : la présomption de démission est validée par le Conseil d’Etat
Concrètement, un salarié vous adresse une lettre de démission, datée et signée, envoyée en lettre de recommandé avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge. Sa décision sera alors très claire pour vous.
Cependant, il convient d’être très vigilant en vérifiant les éventuelles raisons invoquées par le salarié à l’appui de sa démission.
Sa démission pourra être remise en cause si elle trouve sa source dans des manquements de votre part.
Une démission qui doit être exempte de reproches de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail
Lorsque le salarié justifie, dans sa lettre de démission, sa décision de rompre le contrat par des manquements qu’il reproche à son employeur, la démission est alors considérée comme équivoque.
Dans ce cas, la rupture constitue une prise d’acte qui produira les effets :
- soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (voire nul) si les faits invoqués la justifient ;
- soit, dans le cas contraire, d'une démission.
Notez le
En cas de requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse vous devrez vous acquitter : d’une indemnité compensatrice de préavis, d'une indemnité de congés payés sur préavis, d'une indemnité légale de licenciement et éventuellement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (barème Macron).
Peuvent entraîner une telle requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse :
- le non-respect d’obligations contractuelles ;
- le non-respect des conditions de travail.
Illustration rĂ©cente avec un salariĂ© faisant Ă©tat, dans sa lettre de dĂ©mission, d'un certain nombre de difficultĂ©s :Â
- le versement du salaire en plusieurs fois ;
- le non-paiement d'heures supplĂ©mentaires ;Â
- le versement en retard du treizième mois ;Â
- le versement à d'autres salariés de primes qu'il ne recevait pas ;
- sa classification inexacte ;
- et l'absence d'entretien annuel.
Il demande en justice la requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par un arrêt rendu le 15 janvier 2025, la Cour de cassation sanctionne les juges d’appel :
- qui ont retenu que la démission du salarié était claire et non équivoque ;
- malgré des heures supplémentaires non rémunérées (pour un montant de 8 000 euros).
La Cour de cassation rappelle qu’il faut rechercher si le manquement (ici tiré du défaut de paiement d’heures supplémentaires) est de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail, justifiant la rupture aux torts exclusifs de l’employeur.
Conseil
Si le salarié explique, dans sa lettre de démission, les raisons qui sont, selon lui, imputables à l’employeur, il convient de répondre point par point aux accusations et d’expliquer à votre salarié que vous ne pouvez pas considérer sa lettre comme une démission. Invitez-le alors à reprendre le travail ou à vous adresser une lettre de démission claire et non équivoque.
Cour de cassation, chambre sociale,  15 janvier 2025, n° 23-16.286 (en se déterminant ainsi, après avoir fait droit en partie à la demande au titre des heures supplémentaires et sans rechercher si le manquement tiré du défaut de paiement des heures supplémentaires était de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale).
Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot
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