Conventions collectives : en cas de transfert d'activité, les salariés peuvent-ils exiger le maintien de certains avantages liés à la retraite ?

Publié le 20/03/2023 à 11:24 dans Conventions collectives.

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Lors d'un transfert d'entreprise, les salariés bénéficient de certaines garanties, comme, sous conditions, le maintien de leur rémunération. Avant août 2016, c'était le mécanisme du maintien des avantages individuels acquis qui s'appliquait. Un dispositif qui continue de faire parler de lui devant les tribunaux, comme le montre une affaire récente.

Conventions collectives : des avantages liés à la retraite prévus par accord d'entreprise

Un salarié travaillait comme technicien réseau au sein d'une entreprise de gestion et d'exploitation du service public d'eau potable. Une loi du 18 janvier 1991 avait supprimé le régime spécial de retraite dont il bénéficiait au profit du régime général de la Sécurité sociale et avait obligé l'entreprise à maintenir certains avantages de ce régime spécial aux salariés qui en relevaient.

En 2007 et 2008, deux accords collectifs avaient été conclus au niveau de l'unité économique et sociale (UES) de l'entreprise pour définir les modalités d'application de cette loi.

Puis en 2015, le contrat de travail du salarié avait été transféré à une autre entreprise. Le salarié avait alors saisi les prud'hommes pour obtenir le paiement de diverses sommes. Il réclamait notamment un rappel de salaires correspondant à l'avantage tiré du maintien de l'application des dispositions abrogées du régime spécial d'assurance vieillesse de sa précédente entreprise.

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Jusqu'au 8 août 2016, lorsqu'un texte conventionnel cessait d'être applicable (ex : en cas de dénonciation ou de transfert d'entreprise), les salariés conservaient ce que l'on appelait des « avantages individuels acquis », si aucun accord n’avait été conclu en remplacement dans un délai de 15 mois.
La loi travail du 8 août 2016 a supprimé cette notion pour la remplacer par une logique de conservation de la rémunération versée. Aujourd'hui, lorsque le texte conventionnel ne s'applique plus sans qu'un nouvel accord lui soit substitué, les salariés conservent, en application du texte conventionnel dénoncé, un certain niveau de rémunération (voir notre article « Conventions collectives : la disparition des avantages individuels acquis »).

Conventions collectives : le maintien d'un certain niveau de cotisations et de pension ne constitue pas un avantage individuel acquis

Dans cette affaire, les juges d'appel avaient donné gain de cause au salarié. Ils avaient observé que les dispositions conventionnelles dont se prévalait le salarié instauraient, pour une période indéterminée, des avantages individuels touchant à la structure de l'assiette des cotisations salariales, de la rémunération indiciaire et au calcul des droits à pension de retraite. Pour les juges, il y avait bien là un avantage individuel acquis dont devait continuer à bénéficier le salarié après le transfert d'activité de l'entreprise.

Les juges avaient donc condamné son employeur à lui assurer un maintien du niveau de pension de retraite dans les conditions prévues par les accords de 2007 et 2008.

Mais la Cour de cassation n'a pas été de cet avis. Elle rappelle la définition des avantages individuels acquis telle que donnée par le Code du travail à l'époque des faits (article L. 2261-13). Il s'agit d'un avantage qui, au jour de la dénonciation de la convention ou de l'accord collectif, procurait au salarié une rémunération ou un droit dont il bénéficiait à titre personnel et qui correspondait à un droit déjà ouvert et non simplement éventuel.

Or, pour la Cour de cassation, les garanties liées au maintien d'un certain niveau de cotisations sociales et de pension de retraite au titre du régime d'assurance vieillesse dont relevait le salarié à la suite de l'abrogation du régime spécifique applicable constituaient un avantage collectif et non un avantage individuel.

Ces garanties avaient donc été remises en cause par le transfert d'activité sans que le salarié puisse continuer à s'en prévaloir. L'affaire devra être rejugée.


Cour de cassation, chambre sociale, 15 février 2023, n° 21-19.873 (
est un avantage individuel acquis, un avantage qui, au jour de la dénonciation de la convention ou de l'accord collectif, procurait au salarié une rémunération ou un droit dont il bénéficiait à titre personnel et qui correspondait à un droit déjà ouvert et non simplement éventuel. Les garanties liées au maintien d'un certain niveau de cotisations sociales et de pension de retraite au titre du régime d'assurance vieillesse constituaient un avantage collectif et non un avantage individuel)