Clause de non-concurrence : sa violation prive définitivement le salarié du droit à une contrepartie financière

Publié le 25/01/2024 à 17:45 dans Contrat de travail.

Temps de lecture : 4 min

La violation de la clause non-concurrence, imputable au salarié, vous délie de l’obligation de verser à ce dernier la contrepartie financière indexée. Par un récent arrêt, la Cour de cassation a rappelé que cette sanction s’appliquait définitivement, quelle que soit la durée du manquement constaté.

Clause de non-concurrence : rappels

La clause de non-concurrence est une stipulation formalisant l’interdiction pour le salarié :

  • de conclure un contrat de travail ou d’exercer les mĂŞmes fonctions auprès d’un concurrent ;

  • voire de dĂ©velopper, Ă  titre personnel, une activitĂ© concurrente Ă  la vĂ´tre.

C’est donc à l’occasion de la rupture du contrat de travail que celle-ci est appelée à produire ses effets.

Pour être valable, il est indispensable que cette clause soit, entre autres, limitée dans le temps et dans l’espace, indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise mais aussi assortie d’une contrepartie financière.

Cette indemnité de non-concurrence doit, pour mémoire, être proportionnelle aux contraintes pesant sur le salarié. De ce fait, la somme fixée ne peut pas être :

  • dĂ©risoire et, le cas Ă©chĂ©ant, infĂ©rieure au montant prĂ©vu dans la convention collective ;

  • ou anormalement Ă©levĂ©e.

Les circonstances de la rupture ne peuvent pas, au demeurant, justifier sa minoration. La contrepartie doit rester identique, même en cas de rupture conventionnelle ou encore de démission.

Bon Ă  savoir

Cette indemnité, ayant la nature de salaire, peut être appréciée de manière forfaitaire ou sur la base d’un pourcentage de salaire.

Ce faisant, si le salarié ne respecte pas les termes de sa clause de non-concurrence, il risque notamment d’être privé du bénéfice de cette contrepartie financière.

Mais qu’en est-il si cette soustraction, constatée directement à l’issue de la relation de travail, ne dure que l’espace de quelques mois ? Le salarié peut-il malgré tout aspirer au versement d’un solde moindre ?

Violation temporaire de clause de non-concurrence : privation définitive de la contrepartie financière

L’affaire portée devant la Cour de cassation est la suivante.

Un salarié, employé en qualité de cadre technico-commercial, présente sa démission le 11 janvier 2018. Malgré l’activation de sa clause de non-concurrence de 24 mois, il s’engage le 5 février 2018, auprès d’une société concurrente, pour une période allant du 1er mars 2018 au 31 août 2018.

L’employeur saisit alors le conseil de prud’hommes. Se prévalant de la violation de la clause de non-concurrence, il sollicite la restitution des sommes déjà versées ainsi que la condamnation de ce dernier à cesser sa nouvelle activité.

La juridiction prud’homale juge, dans un premier temps, que le salarié n’est coupable d’aucun manquement. Cette décision est toutefois infirmée par la cour d’appel de Douai.

Constatant que l’activité concurrentielle du salarié n’avait duré que 6 mois, elle déduit que l’obligation de non-concurrence devait tout de même s’appliquer sur la base d’une période de 18 mois. Ce qui, par extension, l’a conduit à considérer que l’employeur devait verser au salarié un solde d’indemnité de non-concurrence de 17 766,67 €. Soit 23 985 € minorés des sommes déjà versées.

La Cour de cassation casse, sans surprise, l’arrêt rendu par les juges d’appel.

Conformément à sa jurisprudence, la Haute juridiction rappelle que la violation de la clause de non-concurrence, temporaire ou durable, ne permet plus au salarié de prétendre au bénéfice de la contrepartie financière non-concurrence. Cet agissement l’en prive, en d’autres termes, tant pour la période effective de transgression que pour l’avenir.

Les juges d’appel auraient donc dû considérer que le salarié avait définitivement perdu son droit à indemnisation, et qu’en conséquence, il ne pouvait pas prétendre à un solde d’indemnité.

L’affaire devra être rejugée.

Bon Ă  savoir

La jurisprudence considère, à l’inverse, qu’un salarié peut prétendre au paiement de l'indemnité de non-concurrence si la violation est précédée d’une période de respect de la clause.

Vous souhaitez en savoir davantage sur la rédaction et la mise en œuvre d’une clause de non-concurrence ? Les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Gérer le personnel ACTIV ».

Cour de cassation, chambre sociale, 24 janvier 2024, n° 22-20.926 (la violation de la clause de non-concurrence ne permet plus au salarié de prétendre au bénéfice de la contrepartie financière de cette clause même après la cessation de sa violation)

Portraits Tissot 046 2023 Gilles Piel 2

Axel Wantz

Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot