La communication non violente : entre mode de communication tendance et processus de gestion des émotions
La communication non violente, communĂ©ment abrĂ©gĂ©e « CNV », est de plus en plus Ă©voquĂ©e dans les mĂ©dias, les coachings et les formations. Souvent rattachĂ©e Ă l’affirmation de soi, la CNV trouve de plus en plus de lĂ©gitimitĂ© dans les formations axĂ©es sur la communication.Â
Pour autant, nombreux sont ses dĂ©tracteurs Ă la percevoir et la prĂ©senter comme une technique Ă©dulcorĂ©e et naĂŻve, faisant fi des contraintes, des exigences et des rapports abrupts que l’on peut avoir entre collègues ou avec ses proches.Â
Passons en revue quelques mythes et rĂ©alitĂ©s au sujet de cette nouvelle approche.Â
Mythe n° 1 : la CNV, c’est de la communication
Bien au-delĂ de la forme d’un message, la CNV nous aide Ă identifier nos Ă©motions et nos besoins. Il s’agit davantage d’un processus que d’une technique de communication, et c’est bien cela qui lui confère sa valeur ajoutĂ©e.Â
Le langage CNV pourrait se rĂ©sumer en 4 Ă©tapes, souvent nommĂ©es le « bonhomme OSBD » : Â

Mythe n° 2 : parler CNV, c’est perdre sa spontanéité et avoir un discours exclusivement positif
Il est vrai que la CNV demande de l’entraĂ®nement, mais devient de plus en plus naturelle quand un cercle Ă©largi est formĂ© dans un collectif de travail.Â
Par ailleurs, parler de façon constructive ne se rĂ©sume pas Ă parler de choses agrĂ©ables. Au contraire ! En CNV, on cherche Ă crĂ©er et entretenir des relations de qualitĂ©, donc authentiques. Parler d’une situation dĂ©sagrĂ©able peut ĂŞtre essentiel dans une relation du quotidien.Â
C’est aussi parce que la CNV n’est pas toujours confortable qu’elle va ĂŞtre utilisĂ©e pour maintenir la qualitĂ© des relations les plus importantes pour nous.Â
Mythe n° 3 : la CNV reste peu applicable en entreprise
Vrai et faux. Si son utilisation est conditionnée par l’envie, la disponibilité et l’introspection, son usage s’avère pertinent dans différentes situations.
Dans les formations sur la communication : et ce d’autant plus avec les modes de travail qui évoluent et les relations qui se distancient avec le télétravail. Cette approche va permettre de s’entraîner à émettre et recevoir une critique, dire non et poser des limites, demander un service mais aussi faire et recevoir un compliment. D’ailleurs, quand il est difficile pour un salarié de s’entraîner sur une situation tendue, nous l’encourageons à s’entraîner à repérer ses émotions et ses besoins dans les situations agréables. C’est une approche aussi intéressante dans la gestion de la relation clients.
Notez le
En formation, le symbole chacal/girafe illustre bien la gestion des tensions et est souvent retenu par les participants. Â
Le chacal reprĂ©sente la menace et les jugements. Naturellement, nous sommes portĂ©s Ă avoir Ă nous juger et Ă juger les autres. C’est un mode instinctif qui se dĂ©clenche sans notre volontĂ©. Nous activons ce mode « chacal » envers les autres ou envers nous-mĂŞmes (et parfois mĂŞme, les deux s’activent dans les mĂŞmes situations !).Â
La girafe reprĂ©sente l’empathie et la prise de hauteur. C’est le mode qui nous invite Ă nous questionner sur nos propres Ă©motions et besoins, et Ă©galement ceux des autres. Il n’est pas naturel, c’est pourtant cette approche qui nous aide Ă entretenir des relations de qualitĂ©.Â
Dans les diagnostics sur les risques psychosociaux, pouvoir mieux comprendre les besoins permet de sortir des audits perçus comme « à charge » et laisser plus de place à l’action. Par exemple, une communication perçue comme trop partielle sur les actualités mensuelles pourrait être transformée en « un besoin d’avoir de la visibilité sur l’actualité du mois ». En cela, la CNV pousse à l’action et à la responsabilisation. Dans cette envie grandissante de professionnaliser les collaborateurs sur les soft skills, entraîner chacun à identifier ses ressentis et se questionner sur ce qu’il attend de lui-même est porteur.
En gestion des conflits : habituellement, chaque salariĂ© se focalise sur les comportements et les propos qui crispent dans les situations tendues. Avec la CNV, le facilitateur (ou mĂ©diateur) va amener chaque partie Ă identifier et exprimer ses besoins pour que la relation se fluidifie. Cela permet aussi d’être plus Ă l’écoute des ressentis et des besoins des autres, d’être plus empathique et en retour d’être plus Ă©coutĂ©.Â
Exemple : une équipe doit gérer une charge de travail élevée pour rendre un livrable dans 15 jours et le climat se tend. Voyons la réaction de deux collègues :

Dans l’accompagnement des salariĂ©s suite Ă un arrĂŞt de travail : questionner les collaborateurs sur leurs besoins suite Ă un arrĂŞt permet de limiter les rĂ©actions parfois maladroites. En effet, les managers et RRH peuvent, par besoin de prĂ©server leur collaborateur, lui enlever des tâches qui pourtant rĂ©pondent Ă son besoin d’accomplissement professionnel.Â
Mythe n° 4 : l’usage de la CNV est réservé aux environnements perçus comme « privilégiés »
La CNV est utilisĂ©e dans des sphères dans lesquelles on ne l’attend pas, avec des mĂ©diateurs intervenant dans des quartiers dĂ©favorisĂ©s et des conflits gĂ©opolitiques. Et pour ceux qui ont besoin d’arguments supplĂ©mentaires, le documentaire « Ces mots qui libèrent » (dĂ©diĂ© Ă l’utilisation de la CNV en milieu pĂ©nitentiaire) est fait pour vous ! Â
La CNV en est aux prĂ©mices de son dĂ©ploiement dans les diffĂ©rentes sphères de la sociĂ©tĂ©. RĂ©gulièrement utilisĂ©e en psychothĂ©rapie, elle accompagne des couples, des familles. Certaines Ă©coles françaises ont mĂŞme dĂ©veloppĂ© une approche adaptĂ©e de la CNV auprès des enfants dès l’école maternelle, qui s’entraĂ®nent alors Ă formuler des messages clairs Ă leurs camarades avec qui ils ont pu se disputer. Des enfants qui seront les salariĂ©s de demain.Â
Aidez les salariés à prendre conscience de leurs difficultés psychologiques dans le cadre du travail grâce aux fascicules « Bien vivre son travail : préserver sa santé psychologique ».
Roger G. (2021). Ces mots qui libèrent. Sweetdream.Â
Psychologue sociale et psychothérapeute
Claire Priquet est psychologue sociale et fondatrice du cabinet Claire Priquet Conseils.
Depuis 14 ans, elle accompagne les entreprises en prévention des risques psychosociaux. Egalement …
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