Licenciement après la période de protection : l’impact d’une décision de refus de licencier précisé
Le licenciement d’un salarié protégé nécessite une autorisation préalable de l’Inspection du travail. Toutefois, un employeur peut-il, après un refus d’autorisation pour vice de procédure, licencier un salarié après la fin de la période de protection en reprenant les motifs de licenciement initiaux ?
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Principe : Interdiction de réutiliser les motifs de licenciement refusés par l’Inspection du travail
Le Code du travail prévoit que le licenciement d’un salarié protégé durant la période de protection ne peut intervenir qu’après l’autorisation préalable de l’Inspecteur du travail.
Cette protection est effective pendant toute la durĂ©e du mandat du salariĂ© et peut, selon les cas, perdurer après la fin de ce mandat pour une durĂ©e allant de 6 mois Ă 1 an.Â
Pour statuer favorablement sur la demande d’autorisation, l’Inspection du travail doit apprĂ©cier plusieurs points tels que :Â
le motif du licenciement ;
l’absence de lien entre la mesure de licenciement et le mandat ;
le respect des règles procĂ©durales (par exemple, le respect des dĂ©lais concernant la convocation Ă l’entretien prĂ©alable).Â
Si l’Inspection du travail refuse d’autoriser le licenciement, l’employeur ne peut pas attendre la fin de la pĂ©riode de protection pour mettre en Ĺ“uvre son projet de licenciement.Â
Sur ce point, la jurisprudence est claire : si une demande d’autorisation est refusĂ©e pendant la pĂ©riode de protection, l’employeur ne peut rĂ©utiliser les motifs rejetĂ©s par l’Inspection du travail pour justifier un licenciement ultĂ©rieur.Â
Ce principe, confirmĂ© Ă plusieurs reprises, vise Ă Ă©viter qu’un employeur contourne la protection des salariĂ©s protĂ©gĂ©s.Â
Un refus pour vice procédural n’invalide pas forcément le licenciement ultérieur fondé sur les mêmes motifs
Dans un arrĂŞt rĂ©cent, la Cour de cassation a clarifiĂ© les conditions dans lesquelles un employeur, Ă la suite d’un refus de l’autorisation administrative, peut engager une nouvelle procĂ©dure de licenciement après l’expiration de la pĂ©riode de protection.Â
Dans cette affaire :Â
un employeur avait demandé, pendant la période de protection, l’autorisation pour licencier un salarié pour motif économique ;
cette demande avait été refusée par l’administration du travail pour un motif procédural (non-respect du délai minimum de 5 jours entre la présentation de la lettre de convocation et l'entretien préalable), et non pour insuffisance des motifs économiques invoqués ;
après l’expiration de la période de protection, l’employeur avait licencié le salarié en reprenant les mêmes motifs économiques.
La cour d’appel a alors jugé que le licenciement prononcé à l'expiration de la période légale de protection ne peut être motivé par des faits qui ont donné lieu à une décision de refus d'autorisation du licenciement, quelle que soit la motivation du refus.
La Cour de cassation a annulĂ© cette dĂ©cision, considĂ©rant que le refus d’autorisation administrative pour un motif procĂ©dural ne rend pas les motifs Ă©conomiques invoquĂ©s irrecevables dans une nouvelle procĂ©dure engagĂ©e après l’expiration de la pĂ©riode de protection.Â
L’employeur pouvait lĂ©gitimement utiliser les motifs Ă©conomiques initiaux pour engager un licenciement après la pĂ©riode de protection, dès lors que ces motifs n’étaient pas le fondement de la dĂ©cision de refus d’autorisation administrative.Â
Cet arrêt met en exergue un point de vigilance : il vous convient de bien distinguer les motifs au fond (ici, économiques) des motifs procéduraux.
Ainsi, si le refus provient d’un vice de procĂ©dure, les motifs au fond, qu’ils soient disciplinaires, Ă©conomiques ou autres, peuvent toujours ĂŞtre rĂ©utilisĂ©s dans une nouvelle procĂ©dure.Â
Cour de cassation, chambre sociale, 14 novembre 2024, n°23.15.188 (le refus d’autorisation administrative de licenciement reposant sur un vice procédural ne fait pas obstacle à ce que les motifs économiques initialement invoqués puissent être réutilisés dans une nouvelle procédure de licenciement engagée après la période de protection)
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