Emploi des seniors : ce qu’il faut retenir du projet d’ANI du 14 novembre 2024

Publié le 21/11/2024 à 15:30·Modifié le 25/11/2024 à 12:36
·Dans Embauche
·

Temps de lecture : 7 min

Les partenaires sociaux sont parvenus à conclure un projet d’accord national interprofessionnel (ANI) en faveur de l’emploi des seniors. Entretiens professionnels renforcés, création du contrat de valorisation de l’expérience, rétablissement de la retraite progressive à 60 ans, nouvelles obligations de négocier. Voici les grandes lignes de cet ANI actuellement soumis à la signature des partenaires sociaux.

Le taux d’emploi des seniors ou salariés expérimentés, pour reprendre les termes du projet d’accord interprofessionnel (ANI), est loin de la moyenne européenne. Mais il faut toutefois distinguer le taux d’emploi des 55-59 ans, qui est au-dessus de la moyenne, de celui des 60-64 ans, qui est un des plus bas de l’Union européenne.

L’évolution de la situation de l’emploi des seniors passe par :

  • une amĂ©lioration des conditions de travail et de prĂ©vention des risques professionnels ; 
  • la prĂ©vention des risques de dĂ©sinsertion et d’usure professionnelle ;
  • la mise en place de dispositifs d’amĂ©nagement du temps de travail en fin de carrière ;
  • la crĂ©ation de nouveaux dispositif pour encourager le recrutement des seniors et leur maintien dans l’emploi ;
  • une anticipation de l’évolution des emplois et des compĂ©tences tout au long de la carrière des travailleurs.

Ainsi, les partenaires sociaux demandent une mobilisation des entreprises notamment pour qu’elles intègrent dans leur politique de ressources humaines et de management :

  • une formation relative Ă  la non-discrimination Ă  l’embauche ;
  • une gestion des âges et au management intergĂ©nĂ©rationnel pour que les seniors ne soient pas gĂ©rĂ©s par le prisme de leur âge ;
  • la prĂ©vention de l’usure et des risques psychosociaux ;
  • des entretiens professionnels renforcĂ©s.

Le dialogue social a également une place importante pour améliorer l’emploi des seniors.

Emploi senior : renforcer le dialogue social

Les partenaires sociaux veulent ainsi renforcer le dialogue social sur l’emploi des seniors au niveau des entreprises et au niveau des branches professionnelles.

Précédée d’une phase de diagnostic, la négociation devrait obligatoirement porter sur les thèmes suivants :

  • le recrutement des salariĂ©s expĂ©rimentĂ©s ;
  • le maintien dans l’emploi et l’amĂ©nagement des fins de carrière (notamment les modalitĂ©s de recours Ă  la retraite progressive et/ou au temps partiel) ;
  • la transmission des savoirs et des compĂ©tences des salariĂ©s expĂ©rimentĂ©s (ex : missions de mentorat, de tutorat, mĂ©cĂ©nat de compĂ©tences, etc.).

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Pour le diagnostic, les entreprises pourraient s’appuyer sur leur BDESE et leur document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP).

Le projet d’ANI propose également d’autres thèmes qui pourraient entrer dans cette négociation, comme le développement des compétences et l’accès à la formation, les politiques en matière de santé au travail et de prévention des risques professionnels.

Au niveau des branches professionnelles

Au niveau des branches professionnelles, la négociation serait triennale, sauf si un accord de méthode fixe une périodicité différente. 

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Le projet d’ANI envisage la possibilité d’élaborer un plan d’action type à destination des entreprises de moins de 300 salariés.

Au niveau des entreprises

L’obligation de négocier sur l’emploi, le travail et l’amélioration des conditions de travail des salariés expérimentés concernerait les entreprises d’au moins 300 salariés. Mais sur la base du volontariat, les entreprises de moins de 300 salariés pourraient également engager cette négociation.

A défaut d’un accord de méthode fixant une périodicité différente, la négociation devrait être engagée tous les 3 ans.

Si les négociations n’aboutissent pas, les entreprises pourraient mettre en place un plan d’action unilatéral après consultation des instances représentatives du personnel lorsqu’elles existent.

Emploi des seniors : renforcement des entretiens professionnels

Entretien professionnel renforcé des salariés de 45 ans

Afin de préparer la seconde partie de la vie professionnelle des salariés, le projet d’ANI propose de renforcer l’entretien professionnel réalisé autour leur 45e anniversaire, et ce, sans condition d’ancienneté. 

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Si un accord de branche prévoit une visite médicale de mi-carrière anticipée, l’entretien professionnel pourrait être également anticipé.

Cet entretien renforcé des 45 ans permettrait :

  • de prĂ©venir la perte d’employabilité ;
  • d’aborder l’adaptation ou l’amĂ©nagement des missions et du poste de travail ;
  • de prĂ©venir les situations d’usure professionnelle ;
  • d’aborder les souhaits de mobilitĂ© ou de reconversion professionnelle du salariĂ©.

Il devrait être organisé dans les 2 mois suivant la visite médicale de mi-carrière. Ainsi, cela permettrait d’évoquer les préconisations éventuellement faites par le médecin du travail.

A la demande du salarié, cet entretien professionnel renforcé pourrait être préparé avec l’aide d’un conseiller en évolution professionnelle.

Renforcement de l’entretien professionnel qui a lieu avant les 60 ans du salarié

Deux ans avant leurs 60 ans, le projet d’ANI propose que soit abordé avec les salariés, au cours de l’entretien professionnel, les conditions de leur maintien dans l’emploi et les possibilités d’aménagements de fin de carrière, ainsi que le recours éventuel à la retraite progressive.

Emploi des seniors : création du contrat de valorisation de l’expérience

Afin de favoriser le retour à l’emploi des seniors, les partenaires sociaux proposent à titre expérimental la création du « contrat de valorisation de l’expérience ». 

Il s’agirait d’un contrat à durée indéterminée ouvert aux demandeurs d’emploi d’au moins 60 ans (voire dès 57 ans si un accord de branche le prévoit). Ce contrat de travail suivrait les mêmes règles que le CDI, exception faite de celles relatives à la mise à la retraite.

La mise à retraite ne pourrait être envisagée que lorsque le salarié a atteint l’âge légal de départ et remplir les conditions de liquidation à taux plein. L’employeur ne pourrait pas procéder avant cette échéance. Lors de la mise à la retraite, l’employeur serait exonéré de la contribution patronale spécifique de 30 % sur l’indemnité de mise à la retraite.

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Le projet d’ANI supprime le CDD senior.

Emploi des seniors : faciliter les aménagements de fin de carrière

Anticiper les impacts du départ à la retraite en renforçant le dialogue avec le salarié

Lors du premier entretien professionnel après les 60 ans du salarié, ce dernier pourrait notamment transmettre sa date prévisionnelle d'obtention des conditions requises pour liquider sa retraite à taux plein.

Quant à l’employeur, cet entretien professionnel serait l’occasion d’aborder les éventuelles possibilités d’aménagement de fin de carrière.

Le temps partiel de fin de carrière

Autre idée pour prolonger l’activité des seniors, la possibilité pour le salarié de demander à passer à temps partiel (ou au forfait jours réduit) sur son poste ou un autre dans les conditions suivantes : 

  • possibilitĂ©, pour l’employeur, de compenser tout ou partie de la perte de revenu du salariĂ© selon des modalitĂ©s dĂ©finies par accord collectif d’entreprise ou de branche ;
  • un accord collectif peut prĂ©voir les modalitĂ©s de ce financement avec l’affectation de l’indemnitĂ© de dĂ©part en retraite au maintien total ou partiel de rĂ©munĂ©ration ;
  • si le montant de l’indemnitĂ© de dĂ©part Ă  la retraite est supĂ©rieur au montant des sommes correspondantes Ă  la compensation du maintien de la rĂ©munĂ©ration, le reliquat serait versĂ© au salariĂ©.

Ce temps partiel s’appliquerait jusqu’à la liquidation de la retraite à taux plein, ou jusqu’au recours au dispositif de retraite progressive. Toutefois la réversibilité du temps partiel est possible avec l’accord des deux parties ou selon les modalités définies par accord collectif.

Abaisser l’âge d'accès à la retraite progressive

La retraite progressive permet au salarié de bénéficier d’une fraction de sa retraite tout en exerçant une activité professionnelle réduite et en améliorant ses droits à la retraite.

Actuellement, le dispositif est ouvert aux salariés qui sont à 2 ans, voire moins, de l’âge légal de départ à la retraite et ayant acquis 150 trimestres. Ce qui fait, qu’à terme, le dispositif sera ouvert aux salariés ayant au moins 62 ans. 

Le projet d’ANI propose d’abaisser cette condition d’âge à 60 ans. 

Renforcer l’attractivité du cumul emploi-retraite

Afin de clarifier le dispositif du cumul emploi-retraite, le projet d’ANI propose que le salarié retraité, recruté en CDI, puisse se voir appliquer l’ensemble des règles de droit commun relatives à la mise à la retraite à l’initiative de l’employeur.

Le projet de l’accord national interprofessionnel en faveur de l’emploi des salariés expérimentés du 14 novembre 2024 est actuellement soumis à la signature des organisations patronales et syndicales. Pour que ces mesures s’appliquent, l’ANI devra être transposé dans la loi. 

Accord national interprofessionnel du 14 novembre 2024 en faveur de l’emploi des salariés expérimentés

Isabelle Vénuat

Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot

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