CDI de chantier : le chantier doit être expressément visé

Publié le 18/07/2018 à 07:55, modifié le 19/07/2018 à 11:49 dans Contrat de travail BTP.

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Le contrat de chantier est un contrat spécifique conclu pour la durée d’un (ou plusieurs) chantier(s) et dont la durée ne peut être déterminée précisément. Lorsque le chantier est achevé, le salarié est licencié pour ce motif autonome. Ce contrat doit donc viser expressément le chantier sur lequel le salarié est affecté. Sinon le licenciement pourra être jugé sans cause réelle et sérieuse comme le rappelle la Cour de cassation dans une décision récente.

CDI de chantier : quelques rappels

On a beaucoup parlé dernièrement du contrat de chantier (ou d’opération) puisque les ordonnances Macron ont étendu le recours au contrat de chantier à toutes les branches d’activité.

Dans le BTP, le CDI de chantier est déjà utilisé depuis de nombreuses années. Bien qu’il s’agisse d’un CDI, ce contrat reste adapté aux contraintes du secteur, notamment aux difficultés que rencontrent les entreprises sur la visibilité de leur activité.

Le contrat est donc conclu à durée indéterminée pour un ou plusieurs chantiers dont la durée ne peut être déterminée avec certitude. Ce contrat est un contrat écrit (la nature de ce contrat ne se présume pas) qui devra contenir précisément le ou les chantiers sur le(s)quel(s) le salarié sera affecté. A défaut de ces mentions, le contrat serait réputé conclu à durée indéterminée, dans les conditions de droit commun.

Ce contrat reste donc précaire pour le salarié qui sera, à l’achèvement des chantiers visés, licencié pour ce motif autonome. Rappelons que le chantier devra être définitivement achevé pour justifier la mise en œuvre du licenciement.

Bien que le motif de fin de chantier ressemble à un motif économique, il vous faudra suivre la procédure de licenciement pour motif personnel. Vous devrez donc le convoquer à un entretien préalable, lui notifier son licenciement, respecter le préavis et verser l’indemnité de licenciement en fonction de l’ancienneté acquise par le salarié au moment de la notification.

CDI de chantier : si le chantier n’a pas été expressément visé, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse

Dans cette affaire, un salarié engagé en CDI de chantier en qualité d’assistant chef de chantier gros œuvre est licencié pour fin de chantier, conformément aux usages de la profession. Le salarié a saisi le conseil de prud’hommes pour contester le bien-fondé du licenciement et obtient gain de cause. Les juges d’appel déboutent à nouveau l’employeur et jugent le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, en relevant notamment que la notification du licenciement ne précisait pas le chantier achevé.

L’employeur forme un pourvoi en cassation. La Cour suprême le déboute là encore en indiquant « que la validité du licenciement prononcé en raison de la survenance de la fin d'un chantier est subordonnée à l'existence, dans le contrat de travail ou la lettre d'embauche, d'une clause précisant que le contrat est conclu pour un ou plusieurs chantiers déterminés ;

Et attendu que procédant à la recherche prétendument omise, la cour d'appel, qui a relevé que les stipulations du contrat de travail ne permettent pas de déterminer avec précision le ou les chantiers pour lesquels M. X... a été engagé, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ».

Il semble que la Haute Cour vise à sécuriser ce contrat précaire : la flexibilité de ce contrat ne peut donc se justifier que si les conditions qui l’encadrent sont claires, non équivoques et expresses.

Il faudra donc être vigilant dans l’utilisation de ce contrat : lorsque vous affectez vos salariés sur de nouveaux chantiers non visés par le contrat initial, il faudra alors les prévoir sous forme d’avenant au contrat. Ainsi, chaque nouveau chantier permettra de poursuivre la relation de travail en respectant les règles de forme et de fond. Lorsque les chantiers prendront fin, vous pourrez donc rompre les contrats sur ce fondement.

Besoin d’un modèle de contrat de chantier ? Vous en trouverez dans la documentation des Editions Tissot « Formulaire social BTP commenté ».


Cour de cassation, chambre sociale, 22 juin, n° 15-14740 (la validité du licenciement prononcé en raison de la survenance de la fin d'un chantier est subordonnée à l'existence, dans le contrat de travail ou la lettre d'embauche, d'une clause précisant que le contrat est conclu pour un ou plusieurs chantiers déterminés)

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Charlène Martin

Juriste consultante en droit social

Actuellement conseillère juridique pour les Groupements d'Employeurs, j'ai travaillé de nombreuses années en cabinet d'expertise comptable, cabinet d'avocats et organisation professionnelle au …