Lanceur d’alerte : amélioration de leur protection à compter du 1er septembre

Publié le 24/03/2022 à 14:42, modifié le 28/03/2022 à 11:13 dans Contrat de travail.

Temps de lecture : 6 min

Contenu proposé par les :

Logo

Moins de jargon, plus de solutions

Les Éditions Tissot facilitent l'application du droit du travail au quotidien dans les entreprises.

Contenu ancien

Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus Ă  jour.

Un dispositif général de protection des lanceurs d’alerte a été institué par la loi Sapin 2 du 9 décembre 2016. Une loi visant à améliorer cette protection a été adoptée et le Conseil constitutionnel en a validé l’essentiel. Suite à sa promulgation et à sa publication au Journal officiel, elle entre en vigueur le 1er septembre 2022.

Une définition étendue des lanceurs d’alerte

Sera considéré comme un lanceur d’alerte, la personne physique qui signale ou divulgue des informations qui portent sur un crime ou un délit, une menace ou un préjudice, une violation du droit international, du droit de l’Union européenne, de la loi ou du règlement ou une tentative de dissimulation d’une telle violation.

Aujourd'hui, le lanceur d'alerte doit avoir eu personnellement connaissance de ces informations. Mais à compter du 1er septembre, cette condition est supprimée pour les données obtenues dans le cadre des activités professionnelles. Vos salariés pourront donc signaler des faits qui leur auront été rapportés.

Le lanceur d’alerte devra procéder au signalement ou à la divulgation de bonne foi, et sans contrepartie financière.

Notez-le
Des dispositifs spécifiques d’alerte peuvent continuer à s’appliquer. La loi sur les lanceurs d’alerte ne sera alors pas applicable. Sauf si une ou plusieurs des mesures de protection qu’elle instaure sont plus favorables pour les lanceurs d’alerte. Les sanctions prévues par la loi en cas de procédure « bâillon » intentée à l’encontre d’un lanceur d’alerte pour l’intimider et le réduire au silence seront également applicables à défaut de mesure équivalente prévue par le dispositif spécifique.

Une reconnaissance de ceux qui accompagnent le lanceur d’alerte

Une protection de l’entourage du lanceur d’alerte sera prévue. Sont notamment concernées les personnes physiques en lien avec un lanceur d’alerte, qui risquent de faire l’objet d’une mesure de représailles dans le cadre de leur activité professionnelle de la part de leur employeur, de leur client ou du destinataire de leurs services.

Précisions du fonctionnement des canaux de signalement

La loi permet au lanceur d’alerte de choisir entre le signalement interne et externe.
Vous pourrez ainsi recevoir des signalements émanant notamment de votre personnel (y compris d’anciens membres), mais aussi de candidats à des emplois au sein de votre entreprise, de collaborateurs extérieurs, de sous-traitants, ou encore d’actionnaires.

Ils devront avoir eu connaissance des informations signalées dans le cadre de leur activité professionnelle. Ces informations pourront porter sur des faits qui se sont produits ou qui sont très susceptibles de se produire dans l’entreprise.

Le signalement devra être effectué dans les conditions prévues par la procédure interne de recueil et de traitement des signalements lorsqu’elle existe. A défaut, les informations pourront être communiquées au supérieur hiérarchique direct ou indirect, à l’employeur ou à un référent désigné par celui-ci.

Important
Vous êtes tenu d’établir une procédure interne de recueil (qui peut être confiée à un tiers) et de traitement des signalements, après consultation du comité social et économique (CSE), si vous employez au moins 50 salariés. Mais vous pouvez mettre en place une procédure commune avec d’autres entreprises si vous employez moins de 250 salariés. Cette procédure peut également être commune à plusieurs sociétés ou à leur ensemble si vous appartenez à un groupe.

La divulgation publique restera possible sous conditions.

Bon Ă  savoir
Votre règlement intérieur devra rappeler l’existence du dispositif de protection des lanceurs d’alerte.

La confidentialité de l’identité de l’auteur du signalement

La confidentialité de l’identité des auteurs de signalement, des personnes visées par le signalement et des informations recueillies par l’ensemble des destinataires du signalement devra être assurée. Dans le cadre des procédures mises en œuvre pour recueillir les signalements mais aussi pour les traiter. Cette exigence de confidentialité sera étendue à tout tiers mentionné dans le signalement.

Il sera toutefois possible de divulguer les éléments de nature à identifier le lanceur d’alerte à l’autorité judiciaire sans avoir à recueillir son consentement dans certains cas.

Les signalements ne pourront être conservés qu’un temps limité. Et les données à caractère personnel devront être traitées dans le respect du Règlement général sur la protection des données (RGPD).

Un renforcement de la protection des lanceurs d’alerte

La loi prévoit une irresponsabilité civile et pénale des lanceurs d’alerte dans certains cas et sous certaines conditions.

Elle instaure également à leur profit une interdiction des mesures de représailles. Tout acte ou décision pris en raison d’un signalement ou d’une divulgation effectué par un lanceur d’alerte sera nul de plein droit. Et des provisions pourront alors être accordées par le juge en cas de recours contre une telle mesure. Ou en cas de procédure visant à entraver le signalement ou la divulgation publique.

À l’occasion de tout litige, le conseil des prud’hommes pourra, en complément de toute autre sanction, vous obliger à abonder le compte personnel de formation (CPF) du salarié ayant lancé l’alerte.

Important
La loi précise que les droits garantissant la protection des lanceurs d’alerte ne peuvent faire l’objet d’aucune renonciation ou limitation de droit ou de fait d’aucune forme. Toute stipulation ou tout acte pris en méconnaissance de cette interdiction serait nul de plein droit.

En cas de procédure intentée à l’encontre d’un lanceur d’alerte en raison des informations signalées ou divulguées, de manière abusive (de mauvaise foi) ou dilatoire (pour gagner du temps), vous vous exposez à une amende de 60 000 euros. Le lanceur d’alerte victime d’une telle procédure pourra également bénéficier de dommages et intérêts. Et vous pourrez par ailleurs être condamné à afficher ou diffuser la décision de justice prononcée.

Notez-le
La loi porte également des avancées en matière de procédure d’alerte dans le domaine du secret des affaires.

Pour connaître le détail des mesures applicables à compter du 1er septembre 2022, nous vous invitons à télécharger notre document dédié.

Les mesures prévues par la loi Waserman du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte

Si vous désirez en savoir plus sur les lanceurs d’alerte, nous vous recommandons de consulter notre documentation « Tissot social entreprise ACTIV ».


Loi organique n° 2022-400 du 21 mars 2022 visant à renforcer le rôle du Défenseur des droits en matière de signalement d'alerte, Jo du 22
Loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte, Jo du 22
Conseil constitutionnel, décision n° 2022-838 DC, du 17 mars 2022, JO du 22 (conformité sous réserve : un adjoint chargé de l’accompagnement des lanceurs d’alerte, nommé sur proposition du Défenseur des droits, placé auprès de lui et sous son autorité, peut recevoir certaines délégations dans son domaine de compétence. Cette disposition est constitutionnelle sous réserve que le Premier ministre le nomme et mette fin à ses fonctions sur proposition du Défenseur des droits.)
Conseil constitutionnel, décision n° 2022-839 DC, du 17 mars 2022, JO du 22 (non-conformité partielle : la modification de l’article 392-1 du code de procédure pénale est inconstitutionnelle car sans lien avec la proposition de loi initiale)

Amélie Gianino

Juriste en droit social