Discipline : une lettre de mise en garde revêt-elle le caractère d’une sanction ?
Lorsqu’un de vos salariĂ©s commet une faute, son manager ou vous-mĂŞme en tant qu’employeur pouvez ĂŞtre tentĂ©, dans un premier temps, de lui Ă©crire afin de conserver une preuve. Un mail ou une lettre de mise en garde adressant des reproches Ă votre salariĂ© constitue-t-il une sanction disciplinaire ?Â
Un de mes salariés a commis une faute dans l’exercice de ses fonctions et je souhaite prononcer une mise à pied disciplinaire. Je lui ai déjà adressé une lettre de mise en garde pour lui signifier que j’étais informé des faits. Puis-je engager cette procédure disciplinaire ou la lettre de mise en garde constitue-t-elle la sanction ?
Discipline : définition de la sanction disciplinaire
Rappelons tout d’abord la définition de la sanction disciplinaire. Ainsi, constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, que vous prenez à la suite d’un agissement de votre salarié que vous considérez comme fautif. Cette mesure peut être de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération (Code du travail, art. L 1331-1).
En effet, lorsqu’un salariĂ© commet une faute ou un manquement Ă ses obligations qu’il tient de son contrat de travail, vous pouvez le sanctionner en lui notifiant l’une des sanctions disciplinaires prĂ©vues dans votre règlement intĂ©rieur.Â
Sont des sanctions disciplinaires :
l’avertissement ;
le blâme ;
la mise à pied disciplinaire ;
la mutation disciplinaire ;
la rétrogradation disciplinaire ;
et le licenciement.Â
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Discipline : un courrier de mise en garde pour des faits que l’employeur considère comme fautifs constitue une sanction
On sait que les réprimandes orales ne constituent pas une sanction disciplinaire. Mais qu’en est-il du mail ou de la lettre de mise en garde ? Constitue-t-il une sanction disciplinaire ?
La Cour de cassation a rappelé sa jurisprudence en la matière dans un arrêt du 29 mai 2024. Oui, la mise en garde écrite constitue une sanction disciplinaire.
Lorsque l’employeur adresse des reproches à son salarié pour des faits qu'il estime fautifs par écrit, cet écrit constitue une sanction disciplinaire.
Dans cette affaire, l’employeur avait notamment demandĂ© Ă sa salariĂ©e, par Ă©crit, de :Â
« cesser de formuler des allégations outrancières envers votre hiérarchie » ;
« travailler dans un esprit d'Ă©quipe, conformĂ©ment aux directives qui vous sont donnĂ©es ».Â
Cette lettre de mise en garde par laquelle l'employeur reprochait Ă la salariĂ©e des agissements qu’il considĂ©rait comme fautifs constituait une sanction disciplinaire. De sorte que l’employeur ne pouvait, postĂ©rieurement Ă l’envoi de ce courrier, entamer une procĂ©dure de licenciement disciplinaire pour ces mĂŞmes faits.Â
Cela a une grande importance car la règle suivante s’applique strictement : vous ne pouvez pas sanctionner deux fois les mĂŞmes faits (nous ne parlons pas ici de la rĂ©pĂ©tition des faits après une première sanction).Â
Or, si vous avez adressĂ© un mail ou une lettre Ă votre salariĂ© dans lequel lui sont faits des reproches, vous ne pourrez alors prononcer une autre sanction disciplinaire. Votre pouvoir disciplinaire ayant Ă©tĂ© Ă©puisĂ© par l’envoi du courrier ! Vous devez donc ĂŞtre extrĂŞmement vigilant. Sensibilisez Ă©galement vos managers.Â
Cour de cassation, chambre sociale, 29 mai 2024, n° 22-19.313 (l’employeur qui adresse une lettre de reproches à un salarié pour des faits qu’il estime fautifs est une lettre constituant une sanction disciplinaire)
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