Compétition ou coopération : laquelle impulser dans l’équipe ?

Publié le 21/11/2023 à 10:12 dans Management.

Temps de lecture : 5 min

En entreprise, la compétition doit-elle toujours intervenir ? Et quelle est la place de la coopération pour vos salariés ? La meilleure stratégie ne serait-elle pas finalement une alliance des deux ? Vieux débat. De ces deux approches, laquelle favoriser et pourquoi ? La réponse à ces questions peut vous donner des orientations dans votre management.

Des comportements naturels ?

De nombreuses études en éthologie ont montré combien la compétition était quasiment absente des comportements des animaux. La raison ? Un coût sur la préservation de l’espèce bien trop important. Pourtant, il est reconnu que les joutes ou autres confrontations entre mâles pour l’obtention d’une femelle sont au cœur de toutes les sociétés animales. C’est exact, mais seulement pour favoriser un mâle plus susceptible de donner une progéniture résistante et capable de préserver l’espèce. Cependant, ces affrontements ne vont jamais jusqu’à la mort des congénères et restent dans un cadre très limité. La fameuse loi de la jungle est plutôt illustrative de comportements agressifs et létaux entre espèces, et non au sein d’une espèce, cette fois pour la simple survie alimentaire. Ce point est important à prendre en compte pour ne pas se tromper d’argument.

La coopération en revanche est observable dans le règne animal. Certes, ce comportement est surtout présent dans des espèces vivant en société. Le soin coopératif des bébés, les pratiques de chasse collective ou de comportements altruistes sont autant de cas de coopération.

Coopération et compétition dans l’entreprise

Peut-on en déduire que le microcosme qu’est votre entreprise reproduit ces phénomènes ? Évidemment non. Néanmoins, ces comportements s’observent, encore faut-il les distinguer dans leurs avantages et dans leurs inconvénients.

La compétition se présente d’abord sous la forme d’une démarche de comparaison. En effet, le comportement compétitif passe par la tentative de valoriser ses résultats, son image ou sa légitimité, et ainsi engager un tiers à prendre position en sa faveur plutôt qu’en faveur d’un « adversaire ».

Valoriser ses résultats est-il une attitude condamnable ? Oui et non, tout dépend de son résultat sur l’équipe. Soit elle est constructive pour l’équipe, soit elle est destructive, c’est là la nuance.

Elle sera constructive si elle constitue pour votre salarié un défi envers lui-même, où l’objectif serait d’apprendre quelque chose : une meilleure façon de réagir, de dépasser une difficulté, etc.

Elle sera destructive si jamais cette valorisation se fait par l’opposition de votre salarié aux autres membres de l’équipe ou envers le responsable d’une autre équipe, et ce, par l’emploi de tactiques et de méthodes pour mettre ces autres ou cet autre en difficulté : difficulté de résultat, difficulté d’image, difficulté de légitimité. Cette attitude peut conduire à une implosion de l’équipe, à des comportements de représailles et des conflits sans fin.

Et la coopération, alors ? Ce comportement est très généralement présenté comme une meilleure attitude dans les ouvrages de management. Pourtant, l’expérience montre que la coopération entre salariés ou entre services n’est pas toujours bonne. Cela rejoint finalement la compétition, car la coopération peut être une des bonnes tactiques pour mettre en difficulté des « adversaires » internes et ainsi éliminer une concurrence gênante. De plus, elle demande du temps et une certaine abnégation pour ses utilisateurs. Autrement dit, la coopération n’est pas le Graal absolu en management et n’est pas la solution à tous les maux. Alors que favoriser ?

L’intérêt collectif plutôt que l’intérêt individuel

Une attitude compétitive ou coopérative est positive ou négative suivant le résultat qu’elle apporte.

L’attitude est positive si le résultat est collectif, négative s’il est individuel. Ce sont en fait deux modalités pour une même finalité : l’intérêt collectif. C’est pourquoi, en tant que manager, il vous faut être attentif à la teneur du résultat et non à l’attitude elle-même.

Un salarié qui veut vous démontrer que sa solution est meilleure qu’une autre afin qu’elle soit choisie ou favorisée aura une attitude compétitive, certes, mais positive si cela renforce le collectif.

Un salarié qui se met à la disposition des autres, aide ses collègues et favorise une réflexion de groupe aura une attitude coopérative positive si cela conduit à renforcer le collectif.

Mais entre compétition et coopération, une différence persiste : la coopération dans l’entreprise se heurte à une culture de la compétition très ancrée. Ceci pour au moins deux raisons.

D’une part, la coopération peut être sacrificielle. Si par exemple votre salarié apporte des clients à ses collègues parce qu’ils sont mieux placés pour servir tel ou tel profil de client, ou s’il partage de bonnes pratiques ou s'il aide à la montée en compétences des collègues, cela peut constituer un sacrifice de son propre avantage compétitif pour l’offrir aux autres. La coopération représente donc un coût d’opportunité ou un coût financier qui ne sera pas engagé sans incitation individuelle.

D’autre part, il est très difficile de reconnaître et de valoriser une démarche coopérative dans l’entreprise. Il sera plus facile d’observer les résultats individuels, de les valoriser et de promouvoir ceux qui les ont obtenus plutôt que ceux qui construisent les ponts indispensables à la performance collective.

En bref, favoriser les attitudes conduisant à un résultat collectif par votre management est bien plus difficile que manager par l’intérêt individuel. Et si vos collaborateurs n’ont pas confiance dans votre capacité à le reconnaître et à le valoriser, ils optimiseront en priorité l’atteinte de résultats individuels.

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Pascal Jacquin

Expert en communication interpersonnelle

20 ans d’expérience comme responsable commercial, puis comme directeur de la formation dans diverses grandes entreprises.

Consultant depuis 2004 en ingénierie pédagogique et spécialiste des domaines …