Représentation des salariés au sein des CA... Où en sommes-nous quatre ans après la loi Pacte ?

Publié le 24/10/2023 à 09:12 dans Management.

Temps de lecture : 4 min

En 2019, était votée en France la loi relative à la croissance et à la transformation des entreprises (dite « loi Pacte ») visant à redéfinir la place de l’entreprise dans la société afin de mieux y associer les salariés. L’une de ses dispositions visait à accroître la présence des représentants des salariés au sein des conseils d’administration des entreprises. Ces dernières se sont-elles emparées positivement de cette obligation ? A-t-elle influé sur leurs résultats, leur gouvernance, leur management, etc. ? Point d’étape.

Rappel : le conseil d’administration en entreprise… pourquoi, pour qui ?

Le conseil d’administration (CA) est un organe de direction collégiale, réservé aux sociétés anonymes (SA), aux sociétés par actions simplifiées (SAS), aux associations et à certains établissements publics.

Les membres d’un CA (les « administrateurs ») sont nommés :

  • pour un mandat de 6 ans renouvelable 4 fois au maximum ;
  • par l’assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des actionnaires.

Ils sont notamment chargés de valider les grandes décisions stratégiques de l’entreprise, de veiller à leur bonne application, de contrôler la gestion, la politique financière et toutes décisions prises par la gouvernance de l’entreprise, ou encore de trancher les questions relatives à son objet social. Le conseil d’administration comporte au minimum 3 administrateurs et au maximum 18. Il est composé :

  • d’un prĂ©sident-directeur gĂ©nĂ©ral (P.-D.G.) ou d’un prĂ©sident, accompagnĂ© d’un directeur gĂ©nĂ©ral et/ou de plusieurs directeurs dĂ©lĂ©guĂ©s ;
  • d’un secrĂ©taire de conseil d’administration ;
  • d’administrateurs, qui peuvent ĂŞtre soit des personnes physiques, soit des personnes morales. Auquel cas, elles sont reprĂ©sentĂ©es par des mandataires.

Bon Ă  savoir

Une limite d’âge des administrateurs doit être fixée dans les statuts. Lorsqu’elle est atteinte, l’administrateur doit obligatoirement restituer son siège.

Salariés, salariés actionnaires : que s’est-il passé depuis la loi Pacte ?

Depuis la mise en application de la loi Pacte – soit le 1er janvier 2020 –, toute entreprise comptant au moins 1000 salariés en France (ou au moins 5000 salariés si la société a des filiales à l’étranger), et dont le conseil de direction est constitué de plus de 8 administrateurs (contre 12 auparavant) doit obligatoirement inclure en son sein au moins 2 représentants des salariés. Par ailleurs, dans les sociétés cotées, les salariés actionnaires doivent obligatoirement être nommés au sein du conseil d’administration dès lors qu’ils détiennent 3 % du capital social. Il s’agit de « l’obligation de nomination ».

Quel a été l’impact de ce volet de la loi Pacte en entreprise ?

Si une étude portant sur la période 2007-2017 (soit avant la mise en œuvre de la loi Pacte) tendait à démontrer que la présence de salariés au sein des conseils d’administration était généralement vue d’un mauvais œil par les actionnaires*, l’économiste Patricia Crifo a souligné dès 2021, dans une tribune du Monde, les conséquences positives de cet aspect de la loi Pacte. Elle démontrait notamment que l’accroissement de la part des salariés dans la gouvernance des entreprises augmentait leur capacité à innover et leur productivité.

Par ailleurs, en juillet 2022, un rapport remis par le Gouvernement au Parlement évaluant « les effets économiques et managériaux de la présence d’administrateurs représentant les salariés au sein des conseils d’administration ou de surveillance des sociétés » dressait un bilan également très positif…

Outre le fait que « la loi Pacte a permis un incontestable renforcement du nombre de salariés au sein des conseils d’administration », le rapport insistait sur les effets économiques et managériaux : « La présence d’administrateurs représentant les salariés ou les salariés actionnaires dans les CE (désormais CSE) est enrichissante […]. Les administrateurs représentant les salariés apportent en effet une vision interne de l’entreprise permettant au CA de mieux mesurer les conséquences sociales de certaines décisions, voire de mettre à l’ordre du jour certaines questions liées à l’emploi et aux conditions de travail, et plus généralement une très bonne connaissance opérationnelle de l’entreprise et de son histoire ».

Enfin, d’un point de vue économique, le rapport ajoutait : « Cette vision peut améliorer la performance économique de l’entreprise et avoir des impacts managériaux intéressants ». Les syndicats interrogés rappelaient en effet que « les salariés ont une connaissance irremplaçable de la réalité du travail de l’entreprise et de son histoire et que les administrateurs représentant les salariés ou les salariés actionnaires sont très bien placés pour informer les autres administrateurs de certaines problématiques auxquelles est confrontée la société, comme par exemple certains besoins d’investissement, certains risques ou certaines questions liées à l’emploi, aux compétences, à la motivation ou aux conditions de travail ». Et le rapport de conclure : « Plusieurs études montrent qu’en conséquence, la présence d’administrateurs représentant les salariés ou les salariés actionnaires a un impact plutôt favorable sur la performance financière de l’entreprise ».


Article publié dans la revue International Journal of Human Resource Management sous le titre ESG Performance and Market Value : the Moderating Role of Employee Board Representation – Étude portant sur un échantillon de grandes entreprises françaises non financières de l’indice SBF 120 durant la période 2007-2017

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Valérie Macquet

Conceptrice- rédactrice, conseil en écriture, auteur, biographe, formatrice pour adultes

Après avoir été gérante d’une agence de communication, directrice déléguée d’un hebdomadaire, puis manager commerciale d’une équipe de commerciaux grands comptes, j’en ai eu assez de jongler avec …