Licenciement pour absence prolongée : interdit si l’origine de l’absence est imputable à l’employeur
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Les conditions du licenciement pour absence prolongée
Aucun licenciement ne peut reposer sur la maladie du salarié. Cela constituerait un motif discriminatoire et donnerait lieu à la nullité de la procédure.
Toutefois, il est admis que des absences répétées ou prolongées peuvent désorganiser l’entreprise et ouvrent donc la possibilité de rompre le contrat de travail pour ce motif.
Certains accords collectifs (convention collective, accord d’entreprise…) peuvent prévoir des périodes dites de « garantie d’emploi » en cas de maladie ou d’accident au cours desquelles le licenciement pour absences prolongées désorganisant l’entreprise sera interdit.
C’est notamment le cas pour les ouvriers du Bâtiment (CCN du 8-10-90 à ce jour en vigueur) une garantie d’emploi est prévue à concurrence de 90 jours d’absence sur l’année civile. Pour les ETAM du Bâtiment, la CCN admet la possibilité de licencier dans cette situation mais il faudra alors verser une indemnité spécifique égale à celle de l’indemnité de préavis (article 6.6). Pour les cadres du Bâtiment (article 5.4), la CCN prévoit que le salarié ne peut être licencié pour désorganisation de l’entreprise qu’à l’issue de la période d’indemnisation de son absence maladie et après une période d’un an encore (période de mise en disponibilité) .
C‘est la jurisprudence qui est venue poser les conditions cumulatives d’un tel licenciement :
- l’absence prolongée ou les absences répétées désorganisent la bonne marche de l’entreprise : l’employeur devra alors prouver que l’absence du salarié est à l’origine d’importantes perturbations de l’entreprise ;
- l’employeur devra alors prouver avoir été contraint de procéder à un remplacement définitif en CDI et ce, dans un délai raisonnable, informations qui devront figurer dans la lettre de licenciement.
L’absence du salarié ne doit pas être consécutive à la faute de l’employeur
Dans cette affaire, un salarié engagé en qualité de conducteur d'engins, a été victime d'un accident du travail le 22 février 2010 et placé en arrêt de travail à compter de cette date. Il a été licencié le 7 novembre 2011 en raison des perturbations occasionnées par ses absences prolongées et de la nécessité de procéder à son remplacement définitif. Il a alors saisi le conseil de prud’hommes en contestation de son licenciement, lequel lui donne raison. L’employeur ayant fait appel, les juges ont estimé que le licenciement reposait bien sur une cause réelle et sérieuse et déboutent le salarié.
Le salarié se pourvoit alors en cassation faisant valoir que l’accident du travail dont il avait été victime était consécutif à un manquement grave de son employeur et qu’il ne pouvait donc pas soulever une désorganisation dont il était responsable et à l’origine.
La Haute Cour donne raison au salarié et déboute l’employeur en indiquant que « lorsque l'absence prolongée du salarié pour cause de maladie résulte d'un manquement de l'employeur à ses obligations, ses conséquences sur le fonctionnement de l'entreprise ne peuvent être invoquées pour justifier un licenciement ».
En ne recherchant pas, « comme elle y était invitée, si l'absence prolongée du salarié pour cause de maladie résultait d'une faute de l'employeur », la cour d'appel a eu tort.
Cette décision suit la tendance plutôt restrictive en matière de licenciement fondé sur l’absence prolongée. Il est donc plutôt clair que le licenciement fondé sur l’absence prolongée consécutive à un accident du travail doit être évité. Rappelons tout de même que l’employeur est tenu d’une obligation de sécurité de résultat à l’égard de ses salariés et que la survenance d’un accident du travail reste imputable à l’employeur.
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Cour de cassation,chambre sociale, 10 mars 2021, n° 19-11.305, (lorsque l'absence prolongée du salarié pour cause de maladie résulte d'un manquement de l'employeur à ses obligations, ses conséquences sur le fonctionnement de l'entreprise ne peuvent être invoquées pour justifier un licenciement)
Juriste consultante en droit social
Actuellement conseillère juridique pour les Groupements d'Employeurs, j'ai travaillé de nombreuses années en cabinet d'expertise comptable, cabinet d'avocats et organisation professionnelle au …
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