Nouvelle convention collective de la métallurgie : un accord de révision ne peut pas abroger une convention collective territoriale !
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Depuis le 7 février 2022, date de conclusion de la nouvelle convention collective de la métallurgie, les partenaires sociaux sont à l’œuvre dans les régions pour adapter les conventions collectives territoriales. Mais certains processus de révision de ces conventions choisis pour mettre en place la nouvelle convention collective sont contestés devant les tribunaux. Illustration avec un avenant de révision à la convention territoriale de la Savoie qui vient de faire l'objet d'une décision de cour d'appel.
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Convention collective de la métallurgie : un avenant de révision qui abroge les dispositions territoriales
Le secteur de la métallurgie connaît une multitude de textes conventionnels : plusieurs conventions collectives, des accords et avenants nationaux de branche, une convention collective nationale applicable aux ingénieurs et cadres, une convention collective nationale de la sidérurgie et 76 conventions collectives territoriales de branche.
Face à ce constat, une négociation s'est engagée en 2016 entre les partenaires sociaux pour mettre en place une nouvelle convention collective nationale de branche. Celle-ci a été signée le 7 février 2022, pour une entrée en vigueur prévue au 1er janvier 2024.
Dans ce contexte, des négociations se sont engagées en région pour adapter les conventions collectives locales.
C'est ainsi que le 9 février 2022, un avenant à la convention territoriale de la Savoie a été signé. Cet avenant prévoit d’abroger la convention collective territoriale de 1975 applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants et annexes, à compter de l'entrée en vigueur de la nouvelle convention collective de la métallurgie, soit le 1er janvier 2024.
Un syndicat non signataire de l'avenant avait alors saisi le tribunal judiciaire pour en demander l'annulation. Ce syndicat estimait que l'avenant n'avait pas mis un terme à la convention collective de 1975 « dans les formes ».
Le syndicat rappelait que la disparition d'une convention collective est limitée à deux cas : sa dénonciation, ou sa mise en cause. Or l'avenant du 9 février 2022 prévoyait une abrogation pure et simple de la convention collective de 1975, ce qui était, selon le syndicat, une procédure de « révision-extinction hybride et illicite ». Le syndicat estimait que, ce faisant, les signataires avaient voulu s'affranchir des contraintes résultant d'une procédure de dénonciation (respect d'un préavis de 3 mois, etc.).
De leur côté, les syndicats signataires de l'avenant se prévalaient d'une résiliation « par consentement mutuel ». Ils faisaient valoir que la résiliation par accord mutuel est une pratique courante dans le domaine des accords collectifs, lorsque les partenaires sociaux négocient une nouvelle convention collective stipulant qu'elle « annule et remplace » l'ancienne convention collective.
Dans un jugement du 5 juillet 2022, le tribunal judiciaire de Chambéry avait rejeté la demande d’annulation de l'avenant. Le syndicat avait fait appel de cette décision.
Convention collective de la métallurgie : pas de « révision-extinction » des dispositions territoriales
Dans sa décision du 24 novembre 2022, la cour d'appel de Chambéry fait entendre un tout autre son de cloche que les premiers juges.
La cour d'appel rappelle d'abord que les dispositions du Code du travail (art. L. 2261-7 et suivants) qui prévoient la révision des accords collectifs ne définissent pas cette révision.
La cour souligne ensuite qu'aucune disposition du Code du travail ne prévoit que la révision peut porter sur la disparation ou l'abrogation totale d'un accord collectif. Il en résulte que la procédure de révision est relative aux modifications des conventions collectives ou des accords collectifs et non à leur extinction.
Dans cette affaire, les signataires de l'avenant du 9 février 2022 avaient exposé en préambule que dans la perspective de l'application de la convention collective de la métallurgie à compter du 1er janvier 2024, la convention collective applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants avaient vocation à disparaître à compter de cette date.
Pour la cour d'appel, l'intention des signataires était donc claire et non équivoque : l'avenant était destiné à mettre fin à la convention territoriale de la Savoie.
De plus, il était indiqué que l'avenant entraînait la « révision-extinction » des dispositions territoriales, ce dont il résultait qu'il ne s'agissait pas d'une modification de la convention collective territoriale, mais de son abrogation.
Là encore, pour la cour d'appel, l'avenant ne pouvait pas être interprété comme une dénonciation, les parties signataires n'ayant pas volontairement choisi la procédure de dénonciation prévue par le Code du travail.
Enfin, la cour d'appel se penche sur la convention territoriale de la Savoie, qui stipule (art. 2) qu'elle est conclue pour une durée indéterminée sauf dénonciation par l'une des parties contractantes avec un préavis d'un mois.'
Ce faisant, les signataires de cette convention territoriale avaient prévu expressément qu'il ne pourrait y être mis fin, sauf dénonciation.
Au vu de tous ces éléments, la cour d'appel estime que l'avenant du 9 février 2022 avait donc été adopté en violation de l'article 2 de la convention collective territoriale de la Savoie et des dispositions du Code du travail relatives à la procédure de dénonciation. Cet avenant est donc annulé !
Quelles sont les conséquences ?
Reste à savoir si cette affaire sera portée devant la Cour de cassation.
Si tel est le cas et que le jugement de la cour d’appel est confirmé, cela remettrait en cause la validité de tous les accords de « révision-extinction » et obligerait les partenaires sociaux à refaire une « vraie » procédure de dénonciation…
CA Chambéry, 24 novembre 2022, n° 22/01427 (aucune disposition du Code du travail ne prévoit que la révision peut porter sur la disparation ou l'abrogation totale d'un accord collectif)
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